D'après M. Letouzé dans Le Panthéon de l'industrie : journal hebdomadaire illustré, Paris, 14 février 1886. Les amidons de riz français Nous ne voulons pas cacher la double satisfaction que nous éprouvons en apprenant aujourd'hui à nos lecteurs l'importance croissante que prend l'amidon de riz dans la consommation générale de la France, et en ajoutant que ce surcroît de matière fabriquée est aujourd'hui fourni à notre pays, non plus, comme il le fut trop longtemps, par des fabriques belges ou allemandes, mais par une usine de premier ordre, exclusivement créée pour la fabrication des purs amidons de riz, établie depuis une année seulement, aux portes de Paris, à Croissy, dans la commune du Vésinet au 13, boulevard de l'Ouest. [1] Fragment d'affiche "Amidon de Riz Français" En réalité, outre que la composition chimique n'est pas identique, le riz employé à la fabrication de l'amidon a, sur les autres matières végétales employées au même usage, un avantage immense : c'est qu'il est presque entièrement composé de fécule, et ne contient que des quantités minimes de matières azotées (0,2 % environ), et aucune trace de gluten. Cette extrême pauvreté du riz en matières assimilables, qui est un défaut capital au point de vue des propriétés alimentaires, constitue au contraire, un immense avantage pour l'extraction de l'amidon. [2] C'est grâce encore à cette composition particulière du riz, et aussi, il faut le dire, en employant des procédés d'extraction perfectionnés, que l'ingénieur Théodore Leysen fils, directeur de la Société, est arrivé à faire rendre au riz jusqu'à environ 80 % d'amidon, et concilier ainsi l'excellence tout à fait exceptionnelle du produit avec une extrême modération des prix.
On peut aujourd'hui juger, en plein fonctionnement, l'œuvre dirigée par M. Leysen, se rendre compte de l'excellente appropriation de l'outillage qu'il a créé en grande partie, de la supériorité, au double point de vue du rendement économique et de la qualité du produit, des méthodes qu'il a introduites dans l'usine, et spécialement des avantages qu'il a assurés à ses amidons en excluant, dans leur préparation, toute réaction chimique, toute fermentation, et appliquant exclusivement des actions mécaniques et de simples lavages. Comme l'amidon a des applications très variées dont chacune réclame des propriétés spéciales, ou tout au moins un mode spécial de préparation et de présentation, la Société franco-belge a dû adopter une série de marques, toutes appartenant du reste à la série des amidons de riz français, et toutes également recommandables par leurs qualités fondamentales: couleur tricolore, couleur bleu d'acier, chromolithographies représentant les grands faits d'armes français, la Blanchisseuse, etc. Quant aux applications de l'amidon, elles sont assez connues pour que nous puissions nous dispenser de les énumérer ici, aussi bien que de rappeler les raisons qui recommandent, dans tous les cas, l'emploi d'amidons d'une pureté parfaite. Notons seulement le rôle très étendu que ces matières jouent aujourd'hui dans les soins hygiéniques de la toilette, dans la consommation alimentaire, dans la thérapeutique etc., etc., et tout le monde comprendra, sans autre explication, l'importance capitale qui s'attache à une fabrication intelligente et loyale comme celle qu'ont adoptée les chefs de la Société Franco-Belge. [5] **** Notes et sources : [1] Le 13, boulevard de l'Ouest au Vésinet (aujourd'hui boulevard d'Angleterre) était, dès 1881, le domicile de la famille Leyden. Il apparaît comme le siège social de la Société alors que les installations industrielles sont à 300 mètres de là, sur la commune de Croissy. [2] En 1881, l’Amidonnerie Franco-Belge, une société bruxelloise, décide d’aménager une fabrique d’amidon de riz, de maïs et de froment sur un site industriel de Croissy, saccagé en 1870-71. L’usine, partiellement rebâtie, emploie dès lors près de 200 ouvrières qui s’affairent dans les différents ateliers : trempage et lavage du linge, étuves de macération, essorage, repassage et empesage, séchoirs. L’amidonnage, procédé consistant à imprégner le linge pour lui donner de la raideur, connaît alors son heure de gloire : les hommes portent col et plastron empesés, les dames jupons, dentelles et lingeries abondantes… [3] A partir de 1888, l'Amidonnerie du Phénix au Vésinet dirigée par Alphonse Akar (Paris) apparaît dans l'Annuaire de la distillerie, de la féculerie et de la vinaigrerie pour la France, la Belgique, la Hollande (Annuaire de la distillerie française, 1888, 1889, 1890 ...). [4] Comme souvent dans la revue Le Panthéon de l'industrie, l'article revet un caractère publicitaire autant qu'informatif. Peut-être est-il destiné à rassurer l'opinion car en 1884, au terme d'une procédure de plusieurs années, l'installation sur la commune du Pecq, sur la propriété de M. de Pomereu (Ferme du Vésinet), d'une amidonnerie avait été refusée parce que "à 800 mètres de la terrasse de Saint-Germain, et dans le voisinage des propriétés du Vésinet, elle présenterait des inconvénients pour la salubrité". L'arrêt (19 décembre 1883) faisait la différence entre les diverses sources d'amidon (blé, maïs, riz, ...) en raison de certains traitements chimiques. Recueil des arrêts du Conseil d'État - 1884 (T54,SER2). [5] En 1902, le verrier Numa Parra, à l’étroit dans sa verrerie du quartier Mouffetard à Paris, transférera son usine sur ce site de Croissy pour y fabriquer des verres spéciaux pour les instruments comportant une partie optique : appareils photographiques, caméras, jumelles, télémètres, microscopes, instruments de géodésie.
Société d'Histoire du Vésinet, 2016 - www.histoire-vesinet.org |