... Jean-Louis Barrault (1910-1994) homme de théâtre Acteur français, né au Vésinet, Seine & Oise, le 8 septembre 1910. Répétiteur au collège Chaptal, il suivait, à ses heures de liberté, les cours d'Histoire de l'art de l'École du Louvre, mais il espérait faire du théâtre. Charles Dullin qu'il admirait, le fit débuter à l'Atelier en 1930. Suivirent les années d'apprentissage. Son spectacle prouve l'action irrésistible du geste [...], il fait de la scène un lieu pathétique et vivant [...] et l'on peut dire que c'est cela le théâtre, ce que Jean-Louis Barrault en a fait En 1937, il présente au théâtre Antoine une adaptation de la Numance de Cervantès la guerre civile espagnole faisant écho au spectacle, Barrault connaît alors son premier succès. Puis ce sont Hamlet de Jules Laforgue et La Faim de Knut Hamsun. Jacques Copeau le fait entrer à la Comédie-Française où il monte Phèdre en 1940, puis Les Mal-Aimés de François Mauriac et surtout, en 1943, Le Soulier de satin de Paul Claudel. Barrault ne cessera pas de travailler sur l'œuvre de cet auteur, exceptionnel dans le XXe siècle dramatique. Jean-Louis Barrault dans le rôle de Bérenger, dans Rhinocéros, de Eugène Ionesco, à l'Odéon-Théâtre de France (1960) L'énergie, la passion vont faire de l'Odéon de Barrault un théâtre d'une étonnante vitalité. S'attachant à révéler de nouveaux acteurs, il monte, en 1964, Il faut passer par les nuages de François Billetdoux. En 1966, il confie à Blin le soin de monter Les Paravents de Jean Genet, assurant ainsi la présence du théâtre au cœur de l'actualité la plus brûlante la représentation de cette œuvre, qui fait allusion à la guerre d'Algérie et condamne le colonialisme et le racisme, entraîne de violentes manifestations d'intolérance. Peu de temps après, Mai-68 allait livrer l'Odéon aux contestataires de la Sorbonne. Une fois l'événement dépassé, Barrault, naufragé, dépossédé de son théâtre par André Malraux, se retrouve sur le ring d'une salle de catch, l'Élysée-Montmartre, où il donne un jeu dramatique, Rabelais. Il y avait une leçon de persévérance et d'attention au monde dans cette réalisation agitée, sensible aux modes sonores ou visuelles. Barrault plantait en 1972 son chapiteau entre les murs désaffectés de la gare d'Orsay, revenant encore à Claudel (Sous le vent des îles Baléares), et cherchant toujours des auteurs (Isabella Morra, d'André Pieyre de Mandiargues, 1974). À cet animateur hors pair on a reproché de n'avoir pas la rigueur de Vilar, de jouer de toutes les séductions dans le but de plaire. S'il n'est pas un modèle, Barrault est certainement exemplaire. Exemplaires encore la création de Ainsi parlait Zarathoustra (1974) d'après l'œuvre de Nietzsche mettant en scène l'anachorète face aux métamorphoses de l'esprit, celle des Nuits de Paris (1975) de Restif de La Bretonne, de Zadig (1978) d'après Voltaire.
La fin est triste. Si attachés à leur théâtre, Madeleine Renaud et Jean-Louis Barrault ne sont pas de ceux qui préparent leur succession. Ils se montrent hostiles, au contraire, à tout dauphin présumé, et le théâtre du Rond-Point a langui avec eux les dernières années. Mais qui aurait osé les déposséder de leur couronne? Hors jeu, on les voyait, passer de longues heures attablés au restaurant, seuls le plus souvent.
La carrière cinématographique de Jean-Louis Barrault s'est déroulée plus ou moins dans l'ombre de sa carrière théâtrale, bien que le très joli rôle du mime Debureau, dans Les Enfants du Paradis, de Prévert et Carné, ait contribué, plus qu'aucune activité scénique, à le faire connaître à travers le monde. Il a joué successivement dans Les Beaux Jours, de Marc Allégret (1935). dans Sous les yeux d'Occident, du même réalisateur, puis dans Jenny, Police Mondaine, Mademoiselle Docteur, Un Grand Amour de Beethoven (1936) Les Perles de la Couronne, A Nous deux madame la Vie, Mirages, Drôle de Drame, Orage (1937) La Piste du Sud, L'or dans La Montagne, Altitude 3 200 (1938), ainsi que dans des films plus ou moins négligés par les cinéphiles, mais qui présentaient pour l'acteur l'intérêt d'une composition développée: Le Puritain de Jeff Musso, d'après le roman de Liam O'Flaherty (1937) Le destin fabuleux de Désirée Clary, de Sacha Guitry (1942), où il incarne le jeune Bonaparte La Symphonie Fantastique, de Christian-Jaque (1942, il y est Berlioz) L'Ange de la nuit (le rôle d'un aveugle). On voit encore Barrault dans La part de l'ombre, de Jean Delannoy, dans le Cocu magnifique (film adapté de la pièce de Crommelynck) dans D'homme à hommes, de Christian-Jaque et, en 1950, dans La Ronde (la version de Max Ophüls). Dès 1952, les tournées à l'étranger ralentissent beaucoup son activité cinématographique, mais il a interprété en 1961 le rôle principal de l'adaptation de Dr Jekyll et M. Hyde, écrite et réalisée par Jean Renoir sous le titre: le Testament du docteur Cordelier. Jean-Louis Barrault dans, le Testament du docteur Cordelier, film de Jean Renoir, 1961.
La même année 1961, Barrault incarnait Louis XI dans un " remake" du Miracle des loups, entrepris par André Hunnebelle, avec Jean Marais en tête d'affiche. Signalons enfin qu'il a fait une apparition dans le film de Darryl Zanuck: Le Jour le plus long et qu'il interprète Restif de la Bretonne dans La Nuit de Varennes d'Ettore Scola (1982). La lumière du lac de Francesca Comencini (1988) est son dernier film Outre des mémoires Souvenirs pour demain, au Seuil, Paris (1972), Jean-Louis Barrault a publié plusieurs ouvrages: Reflexions sur le théâtre, J. Vautrain, Paris (1949) Comme je le pense, Gallimard, Paris (1975) Saisir le présent, Laffont, Paris (1984). ____________________ Sources: Dictionnaire du Cinéma, R. Boussinot,1980 Encyclopaedia Universalis, Le Théâtre, 19, Universalia, Vies et portraits, 1995.
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