D'après Cécile Tardif, Portrait de Cécile Chaminade, Editions Louise Courteau, Montréal, 1993. La famille Chaminade arrive au Vésinet Hippolyte Chaminade fait partie de cette bourgeoisie parisienne qui, quels que soient ses revenus, attache une grande importance à son train de vie et en premier lieu à son logement comme le démontrent amplement ses transactions immobilières. De plus, il sait flairer les bonnes affaires. Et, sous le Second Empire, les bonnes affaires ne manquent pas. [...]
Deux feux successivement allumés s'étant éteints sans nouvelle enchère, le terrain dont il s'agit a été adjugé par Me Moisson, notaire, du consentement de M. Buraud, à M. Gagné ès nom sus nommé (1).
Le 22 mai, M. Chaminade est lui-même présent à une autre séance d'adjudication lors de laquelle il rafle le terrain n°73 bis (1364m²) pour 1500 francs. Mais, entre le n°72 et le n°73 bis, il y a ... le n°73! Qui lui a échappé en avril précédent. Qu'à cela ne tienne! en septembre, moyennant une somme de 2000 francs, M. Chaminade rachète à M. Valentin, un futur voisin de la rue de Provence, ce terrain qui avait été adjugé à 1200 francs. Ou bien ce M. Valentin est lui aussi un homme d'affaires avisé — il vient de réaliser un profit de 66 % en cinq mois ! —, ou bien M. Chaminade tient vraiment à posséder ce terrain !
L'heureux propriétaire peut enfin procéder à la construction de la villa de ses rêves. Pourtant, le bonheur de M. Chaminade n'est pas complet. Comment, en effet, s'empêcher de regarder avec envie ce petit n°71 bis, cette toute petite parcelle de terrain en triangle, à l'angle de la route de Ceinture et de l'allée du Lac Inférieur, qui compléterait si admirablement bien son domaine... Helàs sur ce terrain, il y a une maison de garde qui appartient à M. Pallu lui-même et à laquelle celui-ci semble tenir. Mais à tout problème, il y a, paraît-il, une solution. Le 17 décembre 1865, M. Chaminade a résolu son problème : il a réussi à convaincre M. Pallu de lui vendre, pour 4400 francs, son petit triangle et accessoirement — pourquoi pas? — le terrain n°103 (2). Comment ? Eh bien, c'est simple M. Chaminade fera démolir la maison de garde et en fera construire une autre, en tous points semblable et en état d'être habitée, dans un délai de six mois!
S'il ne constitue pas l'une des plus belles réussites de cette perle architecturale qu'est Le Vésinet, le pavillon des Chaminade n'en a pas moins fière allure, et encore aujourd'hui il attire les regards admiratifs. Une allée fermée d'une porte cochère mène à l'entrée qui donne sur un vestibule de marbre, spacieux et majestueux, et qui se laisse deviner derrière deux immenses portes dont la partie supérieure est vitrée. À droite en entrant se trouve la salle à manger avec son magnifique plancher de bois en motifs de chevrons bordés de longues lattes. À gauche, le salon, impressionnant avec ses deux pianos Érard — un piano droit dans l'angle de la pièce et un piano à queue qui lui fait dos — un salon qui sera bientôt témoin de plusieurs soirées musicales. Au premier étage, auquel on accède par un somptueux escalier de marbre, se trouvent les chambres et la salle de bains; au deuxième étage, les chambres des amis, des domestiques et, plus tard, la salle de musique de Cécile.
Au moment où la famille s'installe au Vésinet, le quartier choisi relève encore de la Commune de Croissy. C'est dans le cimetière de cette localité que la famille Chaminade-Courtin acquiert un caveau. Le premier à y être enseveli est le grand-père, Louis Chaminade (1783-1874). Suivront, durant le demi siècle de présence de la famille au Vésinet, Louise Chaminade (1854-1885), Pierre Chaminade (1826-1887), Henriette (1863-1900), Louise de Lagrange, épouse Courtin (1802-1900), Charles Courtin (1830-1903), Louis M Carbonel (18/11/1906), le mari de Cécile, Sylvia Moszkowski (1889-1906), Ludovic Courtin (1838-1909), Stéphanie Chaminade (1825-1910). Comme on le sait, Cécile Chaminade, est décédée à Monte-Carlo. Elle a été inhumée au cimetière de Monaco qui domine les flots bleus, à l'ombre du Jardin exotique [5]. 1) Archives départementales des Yvelines, cote 3E Saint-Germain-en-Laye, 1864, 1865 et 1875.
Société d'Histoire du Vésinet, 2008 - www.histoire-vesinet.org |