D'après L'Excelsior, 21 mai 1926 (Le commissariat cambriolé) et autres sources.

Le Commissariat de Police du Vésinet ... cambriolé (1926)

Dans la nuit du 19 au 20 mai 1926, le commissariat de police de la commune, situé dans une dépendance de la mairie, fut fracturé et dévalisé.
Installé depuis 1913 dans un bâtiment contigu à l'école des garçons, à l'angle de l'avenue des Pages et de la rue des Écoles (de nos jours, la rue Jean-Mermoz) le local comportait deux pièces : la salle de Police et le bureau du commissaire.
Les malfaiteurs sont entrés par la fenêtre du bureau du commissaire ouvrant sur une cour intérieure, ils ont brisé une vitre, fait jouer l'espagnolette et ont ainsi pénétré dans la pièce. Après avoir essayé vainement d'ouvrir un classeur, ils fracturèrent une armoire de laquelle ils emportèrent « une enveloppe renfermant différents billets de banque de 5, 10 et 20 francs, un porte-billets contenant 625 francs, un sac à main contenant 153 francs et deux montres dont une en or » [1]. Ces objets, pour la plupart, étaient des « objets trouvés ». C'est l'agent de police Jouan, premier arrivé à 6 heures du matin, qui a constaté les faits et donné l'alerte.
« Ce n'est pas un butin énorme, sans doute, mais le lieu où il a été récolté doit singulièrement en rehausser le prix aux yeux de ses bénéficiaires et, pour peu qu'ils aient le sens de l'ironie, ils ont dû éprouver un plaisir assez vif pour les consoler de la médiocrité de leur profit. » écrivait l'auteur de l'article de l'Excelsior du 21 mai 1926.
Le commissaire de Police, un certain Bellemain (voir ci-dessous), n'eut d'autre option qu'en aviser le Parquet de Versailles, faisant valoir à sa décharge que le poste n'était plus gardé toute la nuit (de 2h à 6h), depuis quelques jours, en raison de l'indisponibilité de deux agents. Le Parquet ouvrit une enquête confiée à la première brigade mobile ... qui n'a pas abouti.

Le bâtiment ayant abrité le premier commissariat de Police de 1913 à 1927.

Construit à la fin du XIXe siècle, il a subi diverses modifications jusqu'aux années 1980 (photo).

Précisons qu'une telle mésaventure peu glorieuse pour la brigade de police, n'était pas alors d'une grande originalité. Des localités beaucoup plus importantes et beaucoup mieux équipées en matière de police avaient déjà subi le même sort à la même époque comme Besançon, St-Nazaire, St-Cloud, Lyon, Belfort, Briey, Pontoise, et sans doute bien d'autres. Et le poste de police du Vésinet avait déjà été « visité » en 1916 [2]. En entrant, le matin du 14 février 1916, dans le bureau du commissaire, un agent y trouvait un individu qui dormait profondément. Réveillé, l'homme prit la canne du commissaire pour frapper le représentant de l'autorité mais il fut rapidement maîtrisé. Cet individu, qui s'était introduit dans le commissariat inoccupé la nuit en brisant une fenêtre (déjà), avait fracturé le tiroir du bureau du commissaire et ... s'était endormi. Il déclarait se nommer René Berlire mais ne pouvait fournir aucun papier d'identité ni justifier de sa situation militaire, ce qui, en 1916, dût lui causer bien des ennuis. [3]

En 1927, à l'occasion de la Fête Nationale, le maire et la Municipalité invitèrent les Sociétés locales et les habitants du Vésinet à un vin d'honneur et à l'inauguration d'un nouveau commissariat de Police, plus spacieux ... et mieux gardé. M. Bellemain eut l'honneur de recevoir des mains du maire Camille Saulnier les clés du nouveau commissariat, à l'angle des rues Jean-Laurent et Alphonse-Pallu, dont les locaux, comme ceux de la caserne de pompiers voisine, avaient été construits grâce aux libéralités de Mme Adèle Chardron.

    En quelques mots, M. Saulnier remercia chaleureusement Mme Chardron d'avoir, par sa générosité coutumière, fait construire l'immeuble dans lequel se trouveront les services de Police, d'incendie et de secours. Le Maire fait ensuite remise à M. Bellemain, notre sympathique commissaire de Police, de l'immeuble qui lui est destiné. Pour terminer cette cérémonie, le Maire lève son verre en l'honneur de Mme Chardron, des habitants du Vésinet et de la République. [4]

Un gardien de la paix devant le deuxième commissariat du Vésinet vers 1940.

Inauguré le 14 juillet 1927, situé au 49 rue Alphonse Pallu, il restera en fonction jusqu'en 1972.

Collection SHV.

En 1935, peu après le départ du Commissaire Bellemain, un décret fixait l'organisation et les effectifs de la police d'État instituée dans certaines communes des déparlements de Seine-et-Oise (décret-loi du 30 octobre 1935). Il répartissait les communes concernées, en cinq districts et en 49 circonscriptions. Le deuxième district, ayant son siège à Argenteuil, était placé sous la direction d'un commissaire de police hors classe, 1er échelon, chef du district. Il était divisé en treize circonscriptions dont la cinquième, placée sous la direction d'un commissaire de police, de 1ère classe, comprenait les communes du Vésinet (chef-lieu de la circonscription) et Croissy-sur-Seine. [5]

Le Commissaire Bellemain

Nicolas Bellemain est né le 14 mars 1881 à Miribel (Ain) dans une famille de cultivateurs. Après 17 ans de carrière militaire à la section d'infirmiers coloniaux (SIC) en tant que sergent, il fut « gazé » en septembre 1917 et dut retourner à la vie civile avec une pension d'invalidité [6]. Candidat militaire au concours des commissaires de Police en 1919, il fut admis et nommé commissaire spécial de police adjoint de 4e classe sur les chemins de fer de Paris-Lyon-Méditerranée à la résidence de Modane (Savoie). Avant même de rejoindre cette destination, il est affecté au commissariat de Nérac (1920) puis à celui d'Autun (1922). Il arrivera au Vésinet en 1924 où il continuera à gravir les échelons de sa fonction. [7]

    14 février 1924 : M Bellemain (Nicolas), commissaire de police de 3e classe à Autun (Saône-et-Loire), est nommé, en la même qualité, au Vésinet (Seine-et-Oise), en remplacement de M. Bertrand, qui a reçu une autre destination.

    ...

    Le commissariat de police existant au Vésinet (Seine-et-Oise) est rangé dans la 1ère classe, à compter du 1er juin 1925. M. Bellemain (Nicolas), commissaire de police de 2e classe au Vésinet (Seine-et-Oise), est promu, sur place, à la 1ère classe, à compter du 1er juin 1925.

    ...

    Le commissariat de police existant au Vésinet (Seine-et-Oise) est rangé dans la classe exceptionnelle. M. Bellemain (Nicolas), commissaire de police de 1ère classe au Vésinet (Seine-et-Oise) est promu sur place, à la classe exceptionnelle au 1er janvier 1927.

Outre la résolution de quelques faits divers crapuleux, le séjour du commissaire Bellemain au Vésinet fut rythmé par l'encadrement et les mesures de sécurité exigées par le départ du Tour de France qui, chaque année lui causait quelque insomnie ... et les honneurs de la grande presse.
En 1934, M. Bellemain (photo à droite) quitta Le Vésinet, remplacé par un M. Bonnet, pour devenir chef de la Sûreté [8] à Rouen et y poursuivre sa carrière de fin limier. Rouen où, par ailleurs en raison de « services rendus aux œuvres scolaires » il fut décoré en 1938 des palmes académiques. Il fit valoir ses droits à la retraite en 1937 avec le grade de commissaire principal honoraire [9]. Il reçut la croix de la Légion d'Honneur en 1959 (à titre militaire). Il habitait au Perreux-sur-Marne (94) où il est mort le 19 septembre 1964, à plus de 83 ans. La qualité de Mort pour la France lui fut reconnue. [10]

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    Notes et sources :

    [1] Le Petit Journal. 21 mai 1926.

    [2] Journal des débats politiques et littéraires, 15 février 1916 ; Le Radical, 15 février 1916.

    [3] Un certain René Louis Berlire avait été condamné en 1901 pour "infraction à la police des chemins de fer" pendant son service militaire. Placé dans la Réserve, il fut mobilisé en 1914 dans le Service auxiliaire mais rapidement réformé en décembre 1914. Il pourrait ête notre visiteur nocturne. Il est mort à Paris, sur la voie publique, en avril 1916.

    [4] Le Cri des cantons de Saint-Germain-en-Laye, Maisons-Laffitte, Marly-le-Roi. 16 juillet 1927.

    [5] Journal officiel de la République française. Lois et décrets, 9 février 1936.

    [6] Service historique de la Défense, Caen. Cote AC 36 N 09458. Une grande partie de cette carrière a été effectuée en Afrique occidentale française, pour finir en métropole durant la guerre de 14-18.

    [7] Journal officiel de la République française. Lois et décrets (1926/12/23 (Année 58, N°298) et divers autres numéros de 1908 à 1938.

    [8] La Direction générale de la Sûreté nationale était un organisme de police politique fondé par un décret-loi du 28 avril 1934 en remplacement de la direction de la Sûreté générale à la suite de l'affaire Stavisky.

    [9] En tant que commissaire de Police honoraire avec 17 ans 9 mois 17jours (rémunérés) de services militaires et 18 ans 6 mois 13 jours de service civil, sa pension entrait en jouissance le 1er octobre 1937 (J.O.R.F, 2 février 1938)

    [10] Service historique de la Défense, Caen. Cote AC 36 N 09458. « Mort pour la France » est une mention honorifique posthume ajoutée à l'état civil d'une personne afin de reconnaître son sacrifice au service de la France. L'attribution de cette mention est régie par les articles L. 511-1 à L. 511-5 du Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, que le décès soit survenu pendant le conflit ou ultérieurement.

 


Société d'Histoire du Vésinet, 2022 • www.histoire-vesinet.org