Jean-Paul Debeaupuis, revue de presse, janvier 2020.

L'installation du « chemin atmosphérique » vers Saint Germain

Le conseil général des ponts-et-chaussées approuva le tracé définitif du chemin atmosphérique en décembre 1844. D'après l'ordonnance royale et la convention signée avec la compagnie de Saint-Germain, des tubes de propulsion seraient établis sur l'une des deux voies existantes du chemin de fer, depuis la station de Nanterre jusqu'à 1,503 mètres en avant de la gare du Pecq. A ce point, un chemin entièrement nouveau serait construit.

    Il se séparera de la ligne actuelle par une courbe établie à droite, dans le bois du Vésinet, traversera la Seine par un pont appuyé sur l'extrémité d'une île que l'on voit un peu après le pont actuel du Pecq, franchira la vallée et passera en tunnel sous la terrasse. Puis, en décrivant une courbe dans la forêt, il longera l'extrémité du parterre, en passant sous la grille des Loges, et se terminera à la place même du château. Le débarcadère aura une façade principale sur cette place et deux grandes façades latérales l'une directement sur le parterre, dont il complétera la décoration l'autre sur la rue de la Surintendance. C'est assurément le plus beau point d'arrivée de chemin de fer qu'on puisse établir. Il aboutit au centre de la ville, et se trouve placé au milieu des monuments et des principaux établissements de Saint-Germain, c'est à dire entre l'église, le château, le théâtre et l'hôtel de ville L'étendue du parterre sera doublée par l'adjonction qui y sera faite de la partie de la forêt située entre le mur du parterre et la tranchée du chemin de fer. C'est un événement pour la ville de Saint-Germain dont la décadence était manifeste depuis quelques années. [1]

En juin 1845, un article du journal Le Siècle rendit compte du déroulement des travaux entre Chatou et la ville de St-Germain. Les travaux des terrassements dans le bois du Vésinet étaient alors presque terminés. Des dragues travaillaient à creuser l'emplacement des piles du futur pont. Le battage des pieux du viaduc en construction sur la rive gauche, qui devait s'élever à vingt mètres au-dessus du sol de la vallée, occupait plus de deux cents hommes. Sous la terrasse de St-Germain, le souterrain était percé dans toute sa longueur. Enfin, dans la forêt, trois cents hommes et cent cinquante chevaux travaillaient sans relâche à creuser une tranchée profonde. [2]

Construction du viaduc du Pecq (1846)

Un des éléments d'une succession assez spectaculaire d'ouvrages d'art, concentrée sur un parcours de moins de quatre kilomètres.

L'illustration, 29 août 1846.

Première mondiale, les essais de traction par le vide entre le bois du Vésinet et le plateau de Saint-Germain purent commencer en janvier 1847, un mois environ avant les premiers essais atmosphériques sur la ligne de Brunel en Angleterre.
Le chantier était un champ d'expériences très observé. Dès 1846, une locomotive à vapeur classique mais de grande puissance fut confrontée à la pente jugée infranchissable. Elle impressionna l'assistance :

    Une expérience du plus haut intérêt a eu lieu jeudi sur le chemin de fer de Saint-Germain. Les travaux d'art et la pose de la voie étant entièrement terminés entre le bois du Vésinet et la gare établie sur le plateau du parterre, l'essai d'une nouvelle machine locomotive d'une grande puissance a été fait en présence de MM. Adolphe d'Eichthal, Emile et Isaac Pereire, Clapeyron et Rouen. La machine était conduite par M. Eugène Flachat, ingénieur de la compagnie, qui a dirigé tous ces travaux avec un talent remarquable. Au personnel supérieur de la compagnie, s'étaient joints M. Baude, ingénieur en chef des ponts et chaussées, et M. Combe, ingénieur en chef des mines.

    La pente de 35 millimètres, pente sept fois plus forte que celle qui règne entre Paris et Versailles, a été franchie par la machine, avec le convoi qu'elle remorquait, à une vitesse de 36 à 40 kilomètres à l'heure.

    Les nombreux ouvriers avaient préparé des drapeaux et des fleurs pour cette inauguration improvisée qui avait attiré sur les bords du chemin un grand concours de curieux. La surprise de la foule a été grande, lorsqu'on a vu cette puissante machine, qu'on a nommée Hercule, arriver avec la plus grande facilité sur le sommet du plateau de Saint-Germain, que l'on avait considéré jusqu'à ce jour comme infranchissable.

    Cette expérience est très importante pour l'avenir des chemins de fer. C'est un nouvel obstacle qui vient de disparaître devant la puissance de la vapeur, qui, aujourd'hui plus que jamais, peut être considérée comme la reine du monde. M. Flachat a reçu les félicitations de tous les hommes spéciaux qui assistaient à cette expérience, non-seulement pour le progrès qu'elle constatait, mais pour la nature des travaux d'art et la promptitude remarquable avec laquelle, malgré leur énorme importance, ils avaient été exécutés. [3]

Six mois plus tard, les tubes de propulsion étant en place, les essais de la traction atmosphérique ont pu débuter avec succès. De nouvelles expériences destinées à comparer le système atmosphérique à la traction à vapeur classique sont réalisées, de nouveau avec l'Hercule. Si, en juin 1846, les commentaires étaient admiratifs, en février 1847, le journaliste de La Presse, s'interroge. Le choix du système atmosphérique était-il donc si nécessaire puisque déjà, les machines « traditionnelles » assez puissantes pour gravir une telle pente font leur apparition?

    De nouvelles expériences ont été faites sur le chemin de fer atmosphérique de Saint-Germain. Il en a été fait de très curieuses vendredi dernier, expérience de l'un des inventeurs du système, M. Samuda, avec la machine Hercule, pour terme de comparaison. Cette machine, dont nous avons déjà parlé plusieurs fois, est à six roues couplées ; elle a été construite par M. Flachat, ingénieur de la compagnie, pour le service des travaux du chemin atmosphérique, et a remonté régulièrement, pendant plusieurs mois, des trains de 30 et 40 tonneaux, indépendamment de son tender qui pèse 40 tonnes. L'autre jour, elle a remonté, en trois minutes, un train de 70 tonnes, depuis la gare du Vésinet jusque près de l'entrée des souterrains, à 100 mètres au-delà de la pente de 35 millimètres. Le système atmosphérique remorquait, de son côté, des trains de 42, 58 et 60 tonnes, avec des vitesses moyennes de 32 à 40 kilomètres à l'heure, jusque dans la gare de St-Germain. Il serait curieux d'essayer concurremment les deux systèmes, en débarrassant la locomotive Hercule de son tender, qui est inutile pour un parcours de 2200 mètres, et le remplaçant par une simple caisse contenant 7 à 8 cent litres d'eau, on gagnerait ainsi dix tonnes, soit plus du poids de deux voitures chargées, et l'on pourrait faire d'utiles comparaisons entre les dépenses de traction et de capital d'établissement des deux systèmes, véritable but que l'on s'est proposé quand on a voté 1,800,000 frs de subvention pour l'essai du moteur atmosphérique. [4]

Mais alors, le chantier atmosphérique était déjà trop avancé pour que le choix fait trois ans plus tôt soit remis en cause. Il faudra un accident mortel onze ans plus tard, pour y mettre fin.
En janvier 1847 avaient eu lieu des essais officiels en présence de plusieurs députés et de diverses notabilités industrielles sur la section complètement établie, entre la lisière du bois du Vésinet et la terrasse de Saint-Germain-en-Laye.

    Le convoi, parti de Paris à onze heures précises du matin, était composé de trois diligences et d'un wagon, non compris le wagon-directeur placé en tête des voitures. Ce convoi a été d'abord remorqué par une locomotive ordinaire jusqu'au bois du Vésinet, à une lieue environ avant Saint-Germain. Là, cette locomotive a été détachée du convoi, et le wagon-directeur, où avaient pris place les administrateurs et les ingénieurs de la Compagnie, a été attaché à la tringle tractive. Cette tringle, fixée verticalement sur le piston locomoteur, renfermé dans le tube, en dépasse le diamètre au moyen d'une rainure ouverte dans toute l'étendue de ce tube et garnie de petites soupapes qui, à l'aide d'un mécanisme intérieur, s'ouvrent devant cette tringle et se referment aussitôt après son passage. Ce piston, pressé par l'air extérieur, est chassé dans le vide qu'opèrent de puissantes machines à vapeur établies à l'extrémité du tube, et devient l'agent direct de la locomotion.

    Au signal de marche donné au mécanicien, celui-ci a libéré les freins, et le convoi, emporté à grande vitesse, a franchi sans efforts, en cinq minutes, l'espace qui le séparait de Saint-Germain. Il est arrivé au débarcadère du Château après avoir ainsi parcouru une rampe de 35 millimètres d'ascension par mètre. (On sait que dans les voies ordinaires de chemins de fer, où la traction est l'œuvre des machines à vapeur ambulantes, le maximum de pente est de 5 millimètres).

    La descente a été opérée par la seule impulsion donnée au convoi à son point de départ. A la descente comme à la remontée, la vitesse a été modérée et arrêtée par la seule puissance des freins dont les wagons sont pourvus. A une heure, le convoi rentrait à Paris après avoir opéré à la descente la même manœuvre qu'à la remontée. [5]

Chemin de fer atmosphérique de Saint-Germain, machines horizontales motrices.

Figure 1: Plan général vu en dessus montrant les deux machines accouplées et leur transmission de mouvement. Figure 2: Coupe verticale de l'une des

machines et sa pompe. Armengaud Aîné, Chemins de fer atmosphériques. Publication industrielle des machines, outils et appareils les plus perfectionnés

et les plus récents employés dans les différentes branches de l'industrie française et étrangère, 1848. Planche 12.

© Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale, Paris.

Quelques jours plus tard, c'est au tour du Ministre des transports de visiter ce chantier de prestige. A cette occasion, on apprend que les tubes pour la portion qui s'étend entre le bois du Vésinet et Nanterre n'ayant pas été livrés, la compagnie a été obligée d'établir provisoirement une station au Vésinet, afin de commencer une exploitation régulière de la partie terminée vers les premiers jours du printemps. Les convois partant de Paris viendront alors, remorqués par des locomotives, jusqu à ce point et de là, ils seront amenés jusqu'à la gare du château, située sur le plateau, par la force atmosphérique.

    ...Il faut dire, du reste, que ces 2.200 m de chemin de fer complètent tout à fait le chemin en l'amenant sur la hauteur où se trouve la ville de Saint-Germain et présentent l'épreuve la plus complète du système puisque la voie suit une inclinaison graduée depuis 0 jusqu'à 35 millimètres de pente par mètre, rachetant ainsi sur une longueur de 1,916 mètres seulement une différence de niveau de 51,29 m. La rampe la plus forte, celle de 0,035 m existe sur une longueur de 1,000 m. Le diamètre du tube propulseur actuellement posé est de 0,63 m intérieurement ; les deux machines pneumatiques de Saint-Germain se composent de deux paires de cylindres dont les pistons ont deux mètres de course, 2,53 m de diamètre, à une vitesse de 0,40 m/s. Ils épuisent huit mètres cubes d'air par seconde ou dans un tour complet de l'engrenage qui est monté sur l'arbre de leurs manivelles, le nombre énorme de 80 mètres cubes d'air. Deux paires de cylindres à vapeur les mettent en mouvement, leurs pistons ont 2 mètres de course, 0,80 m de diamètre et 2 m/s de vitesse. La vapeur engendrée dans douze chaudières chauffées par six foyers, fonctionne à six atmosphères avec détente pendant les 9/10e de la course des pistons, et agit enfin par sa condensation. Un vide de 0,35 m s'obtient en une minute environ ; il monte ensuite successivement à 40, 50 et même 65 cm pendant la marche du convoi et au fur et à mesure que le convoi approche des machines fixes. [6]

Le dimanche 24 janvier, six convois montèrent à la gare du château. Ils étaient composés de 8 à 9 voitures en plus du wagon directeur. Le signal de la mise en marche des machines fixes était donné aux mécaniciens par un télégraphe électrique partant de la station du Vésinet et arrivant dans la salle des machines. Un vide de 0,35 m s'obtient en une minute environ ; il monte ensuite successivement à 40, 50 et même 65 cm. pendant la marche du convoi et au fur et à mesure que le convoi approche des machines fixes. L'ensemble de l'organisation du chemin, et surtout les machines à vapeur, « les plus parfaites qu'on ait vues jusqu'à ce jour, font le plus grand honneur à M. Flachat, et lui ont valu les félicitations des savants » qui s'étaient donné rendez-vous dimanche au chemin de fer atmosphérique.

Eugène Flachat (1802-1873)

Ingénieur français, il a collaboré aux études de la ligne Paris-Le Pecq inaugurée le 28 août 1837, puis à celle de Paris à Versailles RD (1840-1842).

Aux côtés des ingénieurs Lamé, Clapeyron et de son demi-frère Mony, il est étroitement associé à l'aventure ferroviaire des frères Emile et Isaac Pereire. Il deviendra l'ingénieur en chef de la Compagnie du chemin de fer de Paris à St-Germain.

En 1846, il travaille aux plans des locomotives construites par les ateliers Hallette d'Arras pour la prolongation de la ligne atmosphérique du Vésinet à Saint-Germain, dont l'Hercule (1846) et l'Antée (1849).

Le 21 février, c'est au tour du ministre des travaux publics, et de son sous-secrétaire d'état de visiter le chantier avec la plupart des membres de la commission des expériences ( présidée par François Arago) et une centaine d'invités. De très nombreux envoyés spéciaux de toute la presse régionale avaient fait le déplacement et chacun fit de son mieux pour donner de l'évènement qui avait valeur d'inauguration officielle, un compte-rendu solennel à souhait.

    Le dimanche 21 février, à 9 heures du matin, un train spécial du chemin de fer de Saint-Germain est parti de la gare de Paris, emmenant M. le ministre des travaux publics, accompagné de la commission scientifique chargée de la réception du chemin de fer atmosphérique qui relie la station du Pecq à la ville de Saint-Germain. L'assemblée a examiné avec intérêt ces nouvelles gares couvertes de la station de Paris, qui élèvent leurs voûtes hardies au-dessus du débarcadère et tiennent suspendus à leurs chaînes légères des centaines de châssis vitrés qui répandent partout la lumière à profusion.

    Arrivé à la hauteur du bois du Vésinet, le convoi s'est arrêté un instant. La locomotive habituelle, placée sur un immense tour, a exécuté une rapide conversion et les wagons de voyageurs, attelés au tender particulier qui s'articule sur les tubes atmosphériques, se sont trouvés emportés avec une très grande rapidité. Gravissant la côte escarpée avec une vitesse supérieure à celle qui emporte les convois ordinaires sur les pentes les plus rapides, à peine avait-on eu le temps de se reconnaître, que déjà la masse imposante s'immobilisait au pied du château où naquit Louis XVI.

    Ici a commencé une inspection minutieuse de tous les détails des appareils de traction et des travaux d'art de toute espèce exécutés pour cette entreprise gigantesque, et qui ont vivement impressionné la commission. Qu'on se figure un immense bâtiment en pierres, briques et roches meulières, dominant le plateau de la forêt, un de ces asiles de l'industrie moderne, avec ses longues cheminées obéliscales puis, là-dessous, de vastes fourneaux comme l'imagination peut seule en supposer, des feux titaniques [sic] vomissant la flamme par toutes les bouches, d'immenses cylindres agitant horizontalement leurs gigantesques arbres de fer, un bruit qui laisse bien loin derrière lui tous ceux que produisent les pompes à feu connues, et au milieu de ce fracas étourdissant, de ces roues larges comme des arcs de triomphe, de ces chaînes s'enroulant, de ces leviers tombant et se relevant avec une force surnaturelle, des mécaniciens calmes et attentifs, dirigeant tout par la pensée, précipitant ou arrêtant sans effort les mouvements les plus impétueux de la terrible machine, de cet appareil qui lance dans l'espace ou attire à lui ces masses roulantes par l'absorption de l'air atmosphérique.

    Dans un coin, un modeste compteur en cuivre note scrupuleusement les coups de piston que jette dans les airs la puissante machine. Au centre des appareils, on aperçoit deux petites boites carrées en acajou, au-dessous d'un imperceptible cadran, grand comme les montres de nos pères, présentant à son centre une double aiguille en plume : c'est le télégraphe électrique. A vingt kilomètres de distance existe un semblable mécanisme et deux physiciens, placés à chaque extrémité, causent et correspondent entre eux avec une rapidité qui devance celle de la parole, par le simple mouvement d'un gouvernail presque imperceptible ; car, sensible à la moindre excitation du fluide, la plume vient indiquer sur le cadran les lettres, les chiffres et les signes tachygraphiques de l'alphabet du télégraphe. [7]

Arrivé à la gare de Vésinet, le train spécial, abandonné par la locomotive qui l'avait amené de Paris, fut relié au wagon directeur du système atmosphérique. Le signal de mise en marche de la machine fixe de Saint-Germain, distante de 2,200 mètres, fut transmis au moyen du télégraphe électrique. Trois minutes après, le vide étant fait dans le tube de manière à entraîner le train, celui-ci put commencer à rouler et après trois autres minutes, il arrivait sous la gare couverte de la place du château. L'ascension de la rampe de 30 millimètres par mètre s'était opérée à une vitesse de plus de 40 kilomètres à l'heure.
Après s'être fait expliquer le mécanisme du système, le ministre alla visiter les machines fixes et se fit rendre compte du jeu des divers instruments construits par M. Bréguet et par M. Garnier, tant pour le service du télégraphe électrique que pour la vérification du fonctionnement des machines à vapeur et des cylindres pneumatiques. Pendant ce temps, le convoi redescendait par la force de la gravitation contenue et réglée au moyen des freins et il était aussitôt remonté grâce au piston atmosphérique. Le ministre voulut faire lui-même la descente au moyen des freins. Elle s'effectua avec la régularité ordinaire et la manœuvre du montage du piston sur son axe fût accomplie en présence de M. Dumas, « par des moyens plus simples que ceux employés jusqu'ici et avec une notable économie de temps ». On est alors remonté, à Saint-Germain, avec la même vitesse que la première fois et le cortège officiel est allé visiter les salles d'attente et les abords de la gare.

Chemin de fer atmosphérique de Saint-Germain, wagon directeur. Armengaud Aîné.

Chemins de fer atmosphériques. Publication industrielle des machines, outils et appareils les plus perfectionnés et les plus récents

employés dans les différentes branches de l’industrie française et étrangère, 1848. Planche 10.

© Société d’Encouragement pour l’Industrie nationale, Paris.

A midi environ, le ministre, après avoir adressé ses félicitations à M. Emile Péreire, directeur du chemin de fer, et à M. Eugène Flachat, ingénieur en chef, est reparti pour Paris avec la plupart des personnes invitées, laissant à Saint Germain les membres de la commission qui voulaient commencer sans tarder leurs observations. Au retour, qui s'est effectué jusqu'à la gare du Vésinet par le seul effet de la pente, le ministre a encore voulu s'assurer de la puissance des freins ; en conséquence, il a fait arrêter le convoi, lancé à sa vitesse ordinaire, au milieu du plan incliné, ce qui eut lieu sans secousse. On est reparti ensuite et le convoi, repris au Vésinet par une locomotive, ne s'est plus arrêté qu'à Chatou et à Nanterre où étaient établies des machines fixes.

    Ces gigantesques appareils sont parfaitement construits et font honneur aux ateliers d'où elles sortent, ceux de MM. Alfred Hallette et Cie d'Arras, pour les machines de Saint Germain, de MM. Meyer et Cie de Mulhouse pour les deux de Nanterre et l'établissement de Seraing en Belgique, pour les deux de Chatou. Ces dernières surtout sont, au dire des ingénieurs, d'une exécution très remarquable [8].

L'ouverture au public avait été annoncée pour le 1er avril 1847 mais le chemin de fer atmosphérique de Saint-Germain ne put être « livré » à cette date par suite du retard apporté par l'administration des ponts et chaussées. L'autorisation à cette ouverture était conditionné par la poursuite du service vers la gare du Pecq [l'embarquadère de 1837], concurremment avec le nouveau service organisé à la station du Vésinet et à la gare de la place du Château, à Saint-Germain. Cette prescription jugée « complètement inexécutable dans la pratique » par la compagnie d'exploitation motiva de sa part des observations soumises à l'appréciation du ministre des travaux publics. On dut patienter pour l'ouverture du chemin atmosphérique jusqu'au rendu de l'arbitrage du ministre. [9]
Ce sera finalement le 14 avril 1847.

Pour une étude très complète sur le système du chemin de fer atmosphérique, lire l'article de Paul Smith (en deux parties) en ligne avec une bibliographie très complète.

 

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    Notes et sources:

    [1] Le Globe, 17 décembre 1844. La loi avait été votée le 5 août 1844.

    [2] Le Siècle, 2 juin 1845. Les travaux avaient commencé 15 avril 1845.

    [3] L'Indépendant, 23 juin 1846.

    [4] La Presse, 13 février 1847.

    [5] Journal des débats politiques et littéraires, 18 janvier 1847.

    [6] Le Commerce, 27 janvier 1847.

    [7] Le Petit Courrier de Bar-sur-Seine, 6 mars 1847.

    [8] La Presse, 22 février 1847. Les machines fixes de Nanterre et Chatou ne seront jamais mises en service. Elles seront détruites par des émeutiers en 1848. La station du Vésinet restera ainsi la seule station atmosphérique jusqu'à la fin de l'exploitation du système en 1860. Les locomotives traditionnelles à vapeur prendront le relais le 3 juillet 1860.

    [9] La Presse, 3 avril 1847. Le temps d'arrêt en gare du Vésinet pour le changement de système fut progressivement réduit à seulement deux minutes.

 


Société d'Histoire du Vésinet, 2020 • www.histoire-vesinet.org