D'après Fred Robida, Bulletin municipal n°18 p.43-44 Décembre 1971 – [compléments et notes, SHV, 2019] On patine au Vésinet Oui, je le sais bien, on patine au Vésinet
depuis que la patinoire est ouverte [1]... Mais, tel n'est pas le sens du
titre de cette chronique. Une mission, à la tête du groupe d'histoire,
ne saurait être de traiter des questions d'actualité. C'est au sommaire
du périodique Paris-Caprice du mois de février 1869 que j'ai relevé l'information que résume mon titre...
Cela n'est donc pas une nouvelle récente ! "Le froid excessif qui règne à Paris depuis quelques jours à mis à la mode le patinage: tout le monde patine, ou veut patiner; les lacs du Bois de Boulogne, de Vincennes ou du Vésinet sont véritablement couverts de patineurs, de glisseurs et de promeneurs. Devant les difficultés rencontrées par ceux qui voudraient adhérer au club du Bois de Boulogne, une nouvelle société de patinage vient d'être créée. Elle a choisi pour théâtre de ses exploits, le charmant hippodrome du Vésinet. Tous ceux qui ont assisté aux steeples-chases qui s'y courent pendant la saison ont pu admirer les pièces d'eau qui serpentent gracieusement à travers les massifs couverts de verdure. C'est sur ce lac aux grottes mystérieuses qu'auront la permission de patiner tous les souscripteurs qui paieront la modique cotisation de 5 frs, et cela pour toute la saison. Pour 20 frs, ils auront le droit, en outre d'assister aux fêtes de nuit qui seront splendides; les feux de Bengale, la lumière électrique, les lanternes vénitiennes se chargeront d'éclairer et d'égayer ces réunions nocturnes. Inutile de dire que le public trouvera au Vésinet tout le confortable qu'il pourra désirer."
Reproductions de dessins à la plume signés Albert ROBIDA, père de l'auteur Au moment où paraîtront ces lignes, on
patinera en force au Vésinet... si le froid continue. Remarquons, en passant,
que la lumière électrique n'était pas chose courante en 1869 et que l'allusion
qui y est faite est assez inattendue. Il serait intéressant d'en savoir
davantage et de comparer l'installation réalisée aux Ibis à cette date
avec celle qui, depuis quelque trois ans, trouble le sommeil des oiseaux
de l'île en faisant pour eux de la nuit le jour. Avis aux techniciens. Patineurs sur le lac de Croissy, vers 1900. Autre exemple : Une nombreuse société de patineurs s’était donné rendez-vous, dimanche, au Vésinet, et se livrait avec entrain à l’exercice si salutaire du patinage ; parmi eux se trouvaient M. Paul Déroulède et sa jeune sœur. Malheureusement, la glace vint à se rompre. M. et Mlle Déroulède tombèrent à l’eau, ce qui donna l’occasion à un de nos jeunes pasteurs de Paris, M. F. P., présent à l’accident, de se porter au secours des noyés. Il eût le bonheur de sauver la vie à M. Déroulède, à Mlle Déroulède, et de sortir sain et sauf de ce périlleux sauvetage. Amenés tous trois dans une maison amie, on leur prodigua tous les soins nécessaires, et il n’est heureusement résulté aucune suite fâcheuse de ce petit accident. [2] En fait, on patinait au Vésinet jusqu'à confirmation du dégel, alors que la glace avait déjà fondu en bordure des rives et n'était plus qu'un glaçon flottant et se fragmentant progressivement. Je me souviens qu'une année on patinait encore au lendemain de la Mi-Carême. Il a dû se produire dans le climat de notre région depuis le début du siècle de profonds changements puisque nul ne songerait, de nos jours, à reconstituer aux Ibis le club des patineurs, en escomptant une longue période de gelée, encore moins d'y organiser une fête de nuit. Sans doute, bon an, mal an, de rares patineurs se risquent-ils sur la glace de nos lacs, en dépit des écriteaux "défense de patiner". Mais la glace n'étant pas entretenue, rebute les sportifs... lesquels – et qui leur en ferait grief ? – préfèrent se diriger vers la place du Marché, et cela sans attendre qu'il gèle à pierre fendre. On patine toujours au Vésinet certes, mais à couvert. [3] **** Notes et sources. [1] Une patinoire, au dessus d'un marché couvert et un parking souterrain constituaient un édifice construit sur la place du Marché en 1968-69 et inauguré le 23 octobre 1969, par Joseph Comiti, secrétaire d'État chargé de la Jeunesse, des Sports et des Loisirs. [2] Le Signal : messager de la semaine, 22 janvier 1887. [3] Hélas non ! L'édifice fut détruit par un incendie dans la nuit du 11 au 12 avril 2002. Un projet de patinoire en sous-sol pour le remplacer n'a pas abouti.
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