D'après Le Vésinet, revue municipale, n°51 juin 1980.
Le tennis aux Ibis, une tradition qui ne date pas d'hier
C'est le 28 décembre 1911 que le Conseil municipal du Vésinet, Gaston Rouvier étant maire, décida l'acquisition de l'île du Grand-Lac, d'une contenance de 27.000 mètres carrés, appartenant à la Société en commandite par actions d'Anterroches &   Cie, 32, rue Caumartin à Paris, et dite Société des Eaux et Terrains du Vésinet. Pour ce faire, le Conseil décida de contracter un emprunt de 100.000 frs et vota une imposition extraordinaire de 2,50 centimes, «  qui ne sera cependant mise en recouvrement que dans la mesure où les recettes extraordinaires provenant des diverses concessions de l'île (cercle des patineurs, tennis, etc.), seraient insuffisantes pour assurer le remboursement des 50 annuités de l'emprunt  » .
En 1911, il existait donc déjà au moins un tennis dans l'île, sans doute pour l'agrément des clients du pavillon des Ibis, qui était géré par la société Les Ibis, créée en mars 1906, et à laquelle la Société des Eaux et Terrains du Vésinet avait consenti un bail de 40 ans.
La promesse de vente de l'île prévoyait l'éventualité où la Commune déciderait de créer une ou des piscines, la Société des Eaux et Terrains du Vésinet s'engageant dans cette hypothèse à lui fournir l'eau nécessaire. Ceci prouve également la vocation sportive des lieux, renouvelée de génération en génération, depuis l'hippodrome, la piste cycliste et le cercle des patineurs.
L'Ile comprenait plusieurs constructions, dont le Pavillon des Ibis et les locaux du Cercle des patineurs. Le contrat de location qui précéda la vente et qui couvrait l'année 1912, pour un loyer de 20 frs, précisait que la Commune pouvait, « si elle le jugeait convenable, établir dans l'île un hôtel, des cafés élégants, des bains hydrothérapiques ou autres et enfin tous établissements élégants pour l'agrément du public  ». La Commune devait conserver le lac en l'état et avait le droit d'en disposer pour y donner des fêtes. On relève également, à cette époque, un projet de patinoire artificielle recouverte d'un velum (pour éviter l'action du soleil et de la pluie).
Pavillon ou « Casino » des Ibis, vers 1910.
C'est en 1921 que fut fondé le Club des Ibis, dont le but était de « permettre à l'élite intellectuelle et mondaine de prendre contact et de se fréquenter dans un milieu sélectionné » . Le club, dont les membres, présentés par deux parrains, payaient une cotisation annuelle de 100  frs, pouvait, sous réserve d'une convention passée avec la société Les Ibis, qui exploitait le « casino »  [1] du même nom, organiser des réceptions ayant un caractère d'élégance et de bon goût, des fêtes sportives, des matinées et des soirées musicales ou littéraires, en un mot créer un foyer d'initiative artistique, intellectuelle et sportive » [2]. Dans les commissions, on relève une commission sportive s'occupant de tennis, canotage, patinage, etc.
En cette même année 1921, l'île des Ibis servait aussi de stade scolaire, « les enfants des écoles se livraient, lit-on, à certains ébats qui n'étaient pas sans causer quelques déprédations aux arbustes  », et certains réclamaient une surveillance plus stricte des lieux. Le docteur Mignon [3], conseiller municipal de l'époque, déclarait, le 22 mai 1921, qu'il avait eu l'occasion à plusieurs reprises d'assister aux réunions du groupe sportif scolaire, en qualité de délégué à l'hygiène, Il faisait ressortir, devant ses collègues, tous les bienfaits qu'on est en droit d'attendre du développement des exercices sportifs chez les enfants, et les différentes méthodes à adopter et à suivre pour mener à bien cette oeuvre d'utilité publique, M. le Maire, de son côté, faisait remarquer au docteur Mignon que « le cadre de l'île ne répondait peut-être pas d'une façon parfaite à toutes les règles de l'hygiène, étant donné que le voisinage de l'eau constitue un foyer que l'on peut, surtout pour les enfants, qualifier d'insalubre, en raison de la présence de nombreux insectes et moustiques qui vivent et se reproduisent dans ces parages  ».
En cette même année 1921 fut conclu un nouveau bail (qui faisait certainement suite à des baux antérieurs, puisqu'en 1911, avant même que la Ville ne devienne propriétaire, on trouve déjà trace d'un « pavillon des Ibis » , entre la Ville et la « Société Les Ibis  » , bail qui visait le bâtiment dit «  Casino des Ibis  » et ses dépendances, et qui fut prorogé en 1925, puis en 1927, pour une durée de 46 ans à partir du 1 janvier 1928. On note alors que furent inclus dans la location deux tennis « se trouvant dans l'île et appartenant à la Ville, de même que l'emplacement sur lequel la « société Les Ibis a fait aménager un troisième tennis  » , qui fut autorisé par le Conseil municipal du 18 avril 1922.
Ainsi donc, dès 1922, nous avons la certitude de l'existence de trois courts de tennis aux Ibis. La société Les Ibis avait, de plus, la faculté de posséder des bateaux et d'en tirer bénéfice en les louant pour les promenades sur le lac, les jeudis, dimanches et jours fériés de midi à 20 heures. Elle avait également, en période de gel, le droit de patinage. Il était précisé (article 14 du bail) que dans le cas où le tennis deviendrait un jeu désuet, la société Les Ibis « aura le droit d'installer à ses frais sur l'emplacement des trois tennis figurant aux présentes, d'autres attractions devenues à la mode ».
Le Vésinet Ibis Tennis Club
Le «  Vésinet-Ibis-Tennis-Club  » fut fondé le 3 avril 1925, et officiellement inauguré un mois plus tard. Sa création était due à un Britannique, M. Willouby, qui en fut le premier président en 1925.
Un nouveau club, Le Vésinet Ibis, vient d'inaugurer ses trois courts, qui, l'année prochaine, seront doublés. René Lacoste et le professeur Darsonval, du Sporting Club de Paris, jouèrent un beau double contre Brugnon et Gentien. Les points ne furent pas comptés. [4]
Le tournoi d'ouverture se devait d'être prestigieux. Il eut lieu en juin 1925  :
L'ouverture du Vésinet Ibis Tennis Club
Le tournoi d'ouverture du Vésinet Ibis Tennis Club est fixée au samedi 13 juin, et durera jusqu'au 21. Sur les nouveaux courts du club, au milieu du site charmant de l'île des Ibis, se disputeront les épreuves suivantes : Simple, simple de dames, double  double de dames et double mixte.
De très nombreux prix de grande valeur seront attribués aux gagnants. La Coupe des Ibis est également en compétition. La grande facilité des communications (gare Saint-Lazare, ligne de Saint-Germain, descendre au Pecq) et l'existence d'un excellent restaurant au club, permettront aux joueurs de venir passer au Vésinet, quelques journées agréables, et d'assister aux matches exhibition que plusieurs des meilleures raquettes de France disputeront à l'issue des championnats... [5]
Le Tournois du Vésinet devint alors une manifestation sportive à la mode.
A ses débuts, le Vésinet Ibis Tennis Club était locataire de la société Les Ibis pour les courts de tennis eux-mêmes. Il obtint directement de la Ville et par bail en 1927, année de la construction de l'Hôtel [6], la location de l'emplacement nécessaire à l'édification d'un quatrième tennis, bail remanié en 1934, puis en 1937, où le club obtint l'autorisation de faire construire un pavillon à usage de vestiaire. Ainsi donc, dès 1927, il existait quatre courts de tennis aux Ibis, et c'est en toute connaissance de cause que l'île fut classée, dans cet état, par arrêté du 5 février 1934, à la suite d'une délibération du 27 janvier 1933 du Conseil municipal.
L'Ile des Ibis avec l'hôtel, le Pavillon, les tennis en 1934.
L'Ile des Ibis dans le Plan d'Aménagement de 1937.
Au fil des années, le bâtiment des vestiaires fut aménagé et agrandit jusqu'à mériter l'appellation de Club-House. En 1963 des scènes du feuilleton télévisé Belphégor y furent tournées.
Le lundi 9 juin 1969, à deux heures du matin, les bâtiments furent détruits par un violent incendie. Un automobiliste circulant sur la route du Tour-du-Lac, aperçevant les flammes, alerta les pompiers aussi vite que possible mais malgré leur prompte intervention, rien ne put être sauvé. Les causes de cet incendie n'ont jamais pu être déterminées.
Après l'incendie du 9 juin 1969 ...
... et en 1972, après la reconstruction du Club House
Grâce à l'esprit sportif de tous et surtout à l'appui de la Municipalité, un nouveau Club House plus vaste et plus confortable put être réalisé sans que l'activité sportive ait connu un seul jour d'arrêt. [7]
De nouvelles installations permettant d'accueillir hiver comme été tous les membres du Club, leur facilitèrent, en dehors du tennis, de nombreuses autres activités  : volley-ball, ping-pong, pétanque, bridge. Par la suite, cependant, diverses demandes d'extension furent toujours refusées.
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Notes et sources  :
[1] Le Cornet (Société artistique et littéraire fondée en 1896) y tint son très mondain " Diner du Cornet" à plusieurs reprises à partir de 1932.
[2] Il avait été question d'établir, dans l'île du Champ-de-Courses, un casino avec jeux. Le conseil municipal (avril 1903) se déclara, en principe, opposé à cette création, repoussant " jeux et attractions susceptibles de faire perdre au Vésinet son caractère de villégiature de famille" . L'établissement conserva cependant l'appellation impropre mais usuelle de Casino des Ibis.
[3] Docteur Henri Mignon, Adjoint puis successeur du Dr Raffegeau, directeur de la Clinique des Pages.
[4] Le Figaro, 5 mai 1925. Il n'y aura jamais plus de quatre courts.
[5] Le Figaro, 5 juin 1925.
[6] L'Hôtel, édifié en 1927 sur l'emplacement d'un Théâtre de Verdure datant de 1909, fut exploité jusqu'en 1991 puis abandonné et démoli en 2007. Un nouveau " Théâtre de Verdure" fut aménagé sur le modèle de l'ancien.
[7] Le titre de champion des Yvelines fut gagné de haute lutte en 1971 par l'équipe des Benjamins-Minimes.
 
Société d'Histoire du Vésinet,
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