D'après "L'exposition virtuelle Claude Champagne" de la collection "Bibliothèque et Archives Canada", 2004. Claude Champagne, pédagogue et compositeur canadien Le compositeur et pédagogue canadien Claude Champagne est sans conteste la personnalité qui a exercé l’influence la plus considérable sur la vie musicale du Québec dans la première moitié du xxe siècle. Son action perdure à travers les nombreux compositeurs, pédagogues et musicologues qu’il a contribué à former. « Claude Champagne fut un véritable pionnier à Montréal dans l'enseignement du solfège, de l'harmonie, du contrepoint, de la fugue, de l'orchestration et de la composition au Québec », a déclaré la musicologue québécoise Andrée Desautels. [1] Joseph-Arthur-Adonaï Champagne est né à Montréal, le 27 mai 1891, fils d'Arthur Champagne [2] et Mélina Normandin, son épouse. Il aurait lui-même adopté le prénom de Claude en raison de son admiration pour Claude Debussy. Séjour en Europe En août 1921, Champagne s'embarque pour Anvers, en Belgique, afin d'y rencontrer Alfred Laliberté qui voyage alors en Europe. Il se rend à Bruxelles et prend rendez-vous avec le compositeur Paul Gilson. Ce dernier conseille à Champagne de chercher à Paris une ambiance plus favorable au plein épanouissement de son talent. À Paris, il rencontre le compositeur français Paul Dukas. Cette rencontre est suivie d'une réunion avec André Bloch, directeur de l'American Conservatory, à Fontainebleau. Les deux hommes conseillent à Champagne de poursuivre ses études auprès d'André Gédalge. André Bloch invite Champagne à assister aux cours d'André Gédalge et le présente à ce dernier. Souvenirs du Vésinet (~1923-1924) (1) dans le jardin du Vésinet. (2) fête costumée au Vésinet. (3) C. Champagne caricaturé par Henri Letondal, correspondant à Paris du journal québécois La Patrie.
Au Canada, enseignement et honneurs En décembre 1928, Champagne rentre au Canada et commence à enseigner à l'École supérieure de musique d'Outremont (qui est maintenant l'École de musique Vincent-d'Indy), fonction qu'il exercera jusqu'à sa mort. Il enseigne aussi à la Schola Cantorum de Montréal ainsi qu'au Conservatoire national de musique de Montréal. Il compose Danse villageoise pour violon et piano. La première en est donnée le 19 mars 1929 par Annette Lasalle-Leduc (violon) et Léo-Pol Morin (piano). Il commence à enseigner à l'École normale de musique en 1930 et y enseignera jusqu'à sa mort. Il enseigne aussi au McGill Conservatorium of Music (1933-1944). Il est nommé directeur, organisateur, inspecteur et professeur d'enseignement du solfège et de la musique à la Commission des écoles catholique de Montréal. Il occupera cette fonction jusqu'en 1942. Titulaire de la chaire de musique à l'émission radiophonique Radio-Collège de la Société Radio-Canada, à Montréal (1941-1945), il est nommé directeur adjoint du Conservatoire de musique et d'art dramatique de la province de Québec (1942-1962) et continue à composer (Les Images du Canada français, 1943; Gaspésia, 1944; Symphonie gaspésienne, 1947; Quatuor à cordes, 1951 ; Altitude, 1959).[4] Claude Champagne, 1941. Le 30 mai 1946, il se voit décerner un doctorat honorifique en musique par l'Université de Montréal. En juillet, il part en tournée de deux mois au Brésil, en compagnie de sir Ernest MacMillan. Il est le délégué canadien représentant la CAPAC (Association des compositeurs, auteurs et éditeurs du Canada) au colloque tenu à Washington D.C. par la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et de compositeurs, du 21 au 26 octobre. En 1948, il représente le Canada au Congrès international de folklore organisé par le Conseil international de musique folklorique à Bâle, en Suisse, en septembre. Il commence à composer son Concerto pour piano et orchestre. En 1949, Il est nommé rédacteur en chef pour la musique contemporaine à BMI Canada Ltd. Il devient président à titre honorifique du Conseil canadien des arts (qui est devenu depuis la Conférence canadienne des arts) puis, en 1950, délégué au Conseil international de la musique de l'UNESCO. Il est membre de l'administration ainsi que professeur à la Faculté de musique de l'Université de Montréal. Style de composition Son art ne peut se comprendre entièrement sans tenir compte du contexte culturel de son milieu et de son temps : un milieu québécois qui affirme son appartenance à une civilisation française en se référant à la France comme premier critère de pensée, une époque musicale dans laquelle le folklore et l'art populaire autochtone apparaissent comme les seuls facteurs susceptibles de doter le nouvel art canadien d'un accent bien de « chez nous ». La France guide l'apprentissage des musiciens (les premières années du XXe siècle sont particulièrement propices aux voyages d'études en France) grâce aux efforts déployés par les compositeurs et les érudits français dans le « rafraîchissement » de thèmes et d'harmonies qu'on juge trop usés par un retour à la modalité. Champagne s'inscrit naturellement dans ce courant. Clarté, ordonnance, discipline, tout l'art français se retrouve dans sa langue. Nul mieux que Léo-Pol Morin n'a su cerner le charme et la subtilité de cette musique : « Art poli, infiniment civilisé, aux coins arrondis, qui cherche le beau dessin, les belles formes, la précision et la concision. Nul déchet, nulle bavure, nulle hésitation n'encombrent jamais le style de ce musicien, l'un des plus instruits et des mieux équilibrés de sa génération » (Papiers de musique). On doit aussi tenir compte des rapports de force de différents réseaux (clérical, politique, intellectuel) dans l’attribution des bourses du gouvernement aux compositeurs entre 1919 et 1929 qui ont influencé le déroulement des carrières. Par exemple, en l’absence d’objectifs clairement énoncés justifiant ces bourses, certains intellectuels firent pression pour appuyer la création musicale d'un Rodolphe Mathieu, alors que le clergé favorisait Eugène Lapierre à la direction d’un conservatoire sous son contrôle et que les appuis politiques de Claude Champagne le menèrent à la direction d’un conservatoire d’État. [7] **** Notes et sources : [1] Juliette Garrigues, Champagne Claude (1891-1965), Encyclopædia Universalis, 1968. Claude Champagne, le plus canadien des compositeurs par son accent rythmique et le plus français par l'élégance de son style, la correction et la clarté de son langage. [2] Champagne serait le surnom de son père né Arthur Desparois, d'origine française. [3] Durant son séjour à Paris, Claude Champagne a habité au Vésinet après son mariage. [4] Pour une liste détaillée des œuvres de Claude Champagne et une bibliographie, voir Louise Bail-Milot, Claude Champagne, dans l'Encyclopédie de la musique au Canada (2ème éd.) par Helmut Kallmann et Gilles Potvin, Montréal, Éditions Fides, 1992, p. 224-225. [5] Un film, Bonsoir Claude Champagne, tourné par l'Office national du film, une émission de télévision (SRC), « Hommage à Claude Champagne », et l'inauguration de la salle Claude-Champagne de l'École Vincent-d'Indy font partie des manifestations de cette année 1964 pour la reconnaissance du milieu envers le grand musicien. [6] Louise Bail-Milot, « L'Œuvre et les procédés de composition chez Claude Champagne », M.Mus. (Université de Paris-Sorbonne, 1972). [7] Marie-Thérèse Lefèbvre. Le milieu musical québécois et ses réseaux. Le cas des bourses du gouvernement attribuées aux compositeurs (1919-1929), Globe (revue internationale d’études québécoises); Volume 7, n°1, 2004.
Société d'Histoire du Vésinet, 2019 • www.histoire-vesinet.org |