Petit Réveil des Cantons de St Germain et Poissy, n°52, jeudi 24 octobre 1918 Mort de M. Jules Barrault Une triste nouvelle nous parvenait samedi soir. Nous apprenions que M. Jules Barrault [1], conseiller municipal, ancien premier adjoint au maire, mobilisé depuis la guerre en qualité de pharmacien au 129e régiment d'infanterie, avait succombé après quelques jours de maladie, à Paris, où il se trouvait en permission. « Je ne peux pas me séparer de mon ancien premier adjoint, resté mon collègue au Conseil municipal, de mon pauvre et bon ami Jules Barrault, sans lui adresser, au nom de la municipalité, au nom de tous ceux qui l'ont connu et aimé, les dernières paroles de regret et d'affection, des paroles bien simples, comme lui-même les eût désirées. Jules Barrault était conseiller municipal du Vésinet depuis 1908. Il avait été élu premier adjoint quelques mois plus tard, et, s'il n'avait quitté notre ville, il le serait encore. Sa vive intelligence et sa bonté, son dévouement aux intérêts publics, auxquels je l'ai vu bien des fois sacrifier son intérêt personnel, lui permirent de rendre à la population, à ses collègues, à son maire, des services inoubliables. Mais le plus grand éloge, et le plus vrai, que je puisse faire de l'administrateur municipal qu'il fut pendant des années, c'est de dire que, dans une charge où il si difficile de ne mécontenter personne, Jules Barrault sut, de tous ceux qui l'approchaient à la mairie, se faire des amis reconnaissants. Je dois me borner à rappeler le souvenir du lettré, du poète, et du charme que répandait autour de lui, dans nos fêtes du temps de paix, cet esprit d'une rare et délicate distinction. Le moment où je parle, réclame une autre éloge, l'éloge du patriote et du soldat. Patriote, Jules Barrault le fut, à l'exemple de ces Républicains de 92 qu'il admirait tant. Je l'ai toujours connu, dans notre ville, président de notre section des Vétérans, et lui, jeune encore parmi ces anciens soldats de 70, il savait, de sa parole ardente et jaillissant du cœur, les émouvoir, en parlant de notre France, les émouvoir jusqu'aux larmes. Et lorsque les jours de 92 recommencèrent, et que la République dut armer ses enfants, Jules Barrault partit, avec simplicité, comme il faisait toutes choses. Sur les champs de bataille, grâce à ses connaissances médicales et professionnelles, il se rendit utile et s'employa, de toute son âme, à sauver nos petits soldats. Il avait échappé au péril, il voyait s'approcher la victoire, il se réjouissait du triomphe de demain, et brusquement un mal subit le terrasse, et le voilà ! Je m'incline respectueusement devant la douleur de ceux qui le pleurent. Cette douleur, nous la ressentons, nous la partageons, et il ne nous suffira pas d'inscrire le nom de Jules Barrault parmi les noms des pures et nobles victimes de ces années de guerre, nous garderons à notre pauvre et bon ami, dans notre cœur, une place à part. » Ajoutons que le souvenir de Jules Barrault sera très longtemps conservé à Saint-Germain, où sa participation artistique à la Société des Concerts fut si appréciée. C'était un artiste charmant dans toute l'acceptation du mot. Qui ne se souvient de son interprétation si délicate dans le Baiser de Théodore de Banville. Pauvre ami ! Le Petit Réveil s'incline respectueusement devant la dépouille de Jules Barrault et prie sa famille éplorée d'agréer l'expression émue de ses condoléances attristées. **** [1] Jules Barrault était né le 18 mai 1876 à Tournus (Saône-et-Loire) d'un père marchand de vin à Mâcon. Marié le 3 juin 1905 à Paris (17e) avec Marcelle Hélène Valette, ils eurent deux fils, Max (1906) et Jean-Louis (1910). [2] Bien qu'il n'ait pas été domicilié au Vésinet mais à Paris (17e) au moment de sa mort, son nom figure sur les momuments aux morts communaux.
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