Jean-Paul Debeaupuis, SHV, mars 2025.

Léon Pierson, photographe du Vésinet

Dans son numéro 20 du mois de décembre 1971, le Bulletin municipal rendait hommage à l'un de ses plus fidèles collaborateurs, le photographe PIERSON:

    Adieu Monsieur Pierson

    Nos lecteurs ont eu le loisir d'admirer, dans chaque numéro, depuis la création du Bulletin Municipal, les très belles photographies de M. Pierson.

    Toute la population connaissait M. Pierson à travers son immense talent. Toujours à pied, en véritable chasseur d'images, il parcourait Le Vésinet pour y découvrir la vue qu'il allait pouvoir fixer sur la pellicule et dont chaque exemplaire allait devenir une réelle œuvre d'art.

    Après un long séjour à l'Hôpital de St-Germain, il vient d'y décéder, le vendredi 5 novembre 1971.

    Vésigondin avant 1900, il est apparu dans le grand public en 1950, lorsqu'avec une poignée d'amis, il a voulu créer un photo-ciné-club : ainsi naquit le P.C.C.V.E. [1] Avec le regretté M. Jochembin [2], il a su donner le goût, inculquer l'art de la photo et du cinéma aux adhérents de cette jeune association, aussi bien pour la vision photographique que pour les travaux de laboratoire.

    Pendant 20 ans, il a présidé aux destinées de ce club local mais déjà, au cours des dernières années, il était touché par la douloureuse maladie qui devait l'emporter. En 1968, malgré l'amputation d'un pied, il parvenait, grâce à un courage et une volonté extraordinaires qui ont fait l'admiration du corps médical, chargé de sa rééducation, à reprendre ses activités photographiques dans les rues du Vésinet, à l'occasion des cérémonies, pour la Municipalité et notre Bulletin Municipal.

    Le 23 décembre 1970 il quittait son domicile du 4 place de l'Église, où il était entouré d'amis fidèles et attentionnés, les Paucelier, les Barbance (Ets Nicolas), pour entrer à l'Hôpital de St-Germain, et ne plus revoir son Vésinet qu'il aimait tant.

    Le Bulletin municipal est en deuil et pleure un grand ami.

Lucien Léon Marchand-Pierson avait choisi comme son père la simple signature de Pierson.
Dernier représentant d'une longue lignée de photographes, il avait suivi les traces d'Etienne Alexandre Marchand-Pierson (1858-1940) son père qui était venu s'installer au Vésinet dans les années 1880, pour la saison des villégiatures. La famille habitait alors au 96 route de Croissy. Etienne, le père, était surtout connu comme « photographe d'atelier » et portraitiste. Pourtant, il nous a laissé une photo du tramway traversant Le Vésinet, sur le boulevard Carnot.

Tramway dans la traversée du Vésinet (Machine SLM - Winterthur) vers 1900.

Cliché Pierson (Etienne Alexandre Marchand-Pierson).

Né à Paris (17e) le 13 mai 1892, au 91 avenue de Clichy, domicile hivernal de ses parents, Lucien Léon Marchand-Pierson, dès la sortie de l'école, est initié à la photographie. En 1913, le Bulletin de la Société d'excursions des amateurs de photographie, dans son compte-rendu des Séances Extraordinaires de Projections (13 et 16 Février 1913) mentionne « ... de M. Pierson, plusieurs jolis effets de lumière au Vésinet. » S'agit-il du père ou du fils ? C'est de Léon qu'il s'agit. Il a été présenté et admis l'année précédente (26 décembre 1911) à cette Société par MM. Van der Vliet et Roy.

Après un service militaire (1913-15) comme infirmier, Léon est mobilisé durant toute la guerre à la 22e section d'Infirmiers du 162e Régiment d'Infanterie. Démobilisé (caporal) le 26 août 1919, il habite alors Paris (8e) et fonde avec son père et son frère cadet Louis Auguste (1902-1982) une Société en nom collectif, constituée entre eux, ayant pour objet le commerce de photographe et toutes industries s'y rattachant tant directement qu'indirectement. En 1925 Louis cèdera ses parts à Léon avant de partir en province. Marié à Andrée Goguey (1887-1962), ils habitent au 15 rue La Bruyère (Paris 9e). La famille qui compte deux enfants, Claude et Sylvie, prend l'habitude de venir séjourner au Vésinet à la belle saison. Ils résident dans un nouvel immeuble, au 4 rue Ernest-André. Après le décès de sa femme à Paris en 1962, Léon Pierson s'installera à demeure au Vésinet, 4 place de l'Eglise, jusqu'à sa mort en 1970.

Dès les années 1950 et plus encore à partir de la publication régulière du Bulletin municipal en 1965, les photographies de Pierson deviendront familières aux Vésigondins. D'abord sur les couvertures des brochures produites par la Ville ou le Syndicat d'Initiative, puis illustrant toutes les publications consacrées au Vésinet, elles accompagneront d'innombrables articles rendant compte de la vie locale, cela durant près de 20 ans.

Le pont des Ibis, un des édifices les plus photographiés du Vésinet

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Le lac des Ibis, les petites rivières

sujets de prédilection de Léon Pierson

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Les petites Rivières vers la route de Croissy

cliché de Léon Pierson illustrant un article sur Le Vésinet dans la revue Sites et Monuments (n°54, 1971)

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Dans l'atmosphère brumeuse du petit matin au temps du Vélosolex

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Les joies de la « glisse »

Avant l'édification de la Patinoire, lorsque le Lac des Ibis était pris dans la glace parfois pendant plusieurs semaines.

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Comparaison : à gauche, un cliché dû à l'un des lauréats d'un concours du Syndicat d'Initiative en 1950...

l'autre de Léon Pierson et utilisé sous sa signature par le Syndicat d'Initiative (1967-68) voir ci-dessous. [3]

 

 

 

Des publications du Syndicat d'Initiative illustrées par Pierson.

Origines familiales

Etienne Alexandre Marchand, né à Paris le 9 juin 1858, était un enfant naturel (de père inconnu). Par jugement en date du 5 février 1885, le photographe parisien Jean-François Pierson adoptait Etienne Alexandre Marchand qui s'appellerait désormais Marchand-Pierson pour l'état civil. Il choisira cependant le nom « Pierson » pour exercer sa profession et concrétiser la filiation. Formé à la photographie par son père adoptif, il lui succédera après la mort de Jean-François Pierson le 21 janvier 1892, dans l'atelier que possédait ce dernier au 41 rue Taitbout (9e).
Jean-François Pierson (1818-1892) né à Hinckange (Moselle) le 26 octobre 1818 était le frère aîné de Pierre Louis Pierson (1822-1913) qui, associé aux frères Mayer, fut un photographe très en vue sous le Second Empire. [4]
On ne sait rien des débuts de la vie professionnelle de Jean-François Pierson avant qu'il ouvre l'atelier de photographie de la rue Taitbout où il pratiquait principalement le portrait. François Boisjoly fixe le début de son activité à 1863 qui s'achèvera avec son décès le 21 janvier 1892. [5, 6]
Entre temps, Etienne Marchand-Pierson était venu s'installer'au Vésinet pour la belle saison et où il se maria (Le Vésinet, 1889) avec Victorine Lemaire. [7] Le couple aura un fils, Lucien Léon, qui est l'objet de notre article.

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    Notes et sources :

    [1] Le Photo-Ciné-Club du Vésinet et Environs (P.C.C.V.E.) fut fondé en 1950 à la suite d'une exposition photographique organisée par le Syndicat d'Initiative (dont Pierson faisait partie) intitulée Les quatre saisons au Vésinet. L'Association a ensuite évolué pour être aujourd'hui Le Vésinet-Boucle-Images (V.B.I.)

    [2] Simon Jochembin, journaliste sportif et animateur de clubs de cinéastes amateurs est mort accidentellement avec son épouse en juillet 1959. Ils avaient 41 et 31 ans.

    [3] Le cliché de gauche est dû à l'un des trois lauréats du concours (voir note 1) : MM. Relot, Gallas ou Viandier. Selon le règlement du concours, les clichés soumis pouvaient être utilisés ensuite par le SI. A droite, pour un des exemplaires du Petit Plan Petit, livret publié pour le Syndicat d'Initiative, la photo de couverture, prise plus de 15 ans après la première, est due à Pierson.

    [4] Sous le nom de « Mayer frères et Pierson », possédant son siège au 35 rue Louis-le-Grand (avec entrée donnant sur la rue des Capucines) et une succursale rue Vivienne 48, les fondateurs et gérants de la nouvelle société sont les «artistes-photographes» Léopold-Ernest Mayer (1817-1895), photographe de l’empereur Napoléon III, demeurant rue Vivienne 48 à Paris, et Pierre-Louis Pierson, demeurant à Paris, 13 boulevard des Capucines. Le frère de Mayer, Louis Frédéric, n'est pas mentionné dans l'acte de fondation mais participe à la production de photographies. La société a pour but, selon l’acte de fondation, « la confection et la vente de toute reproduction à l’aide du daguerréotype, de la photographie ou de tout autre mode qui serait ultérieurement découvert ». Au moment de la création, les deux partenaires apportaient, outre leur clientèle et leur matériel, 11.350 négatifs ou clichés. En 1856, l'atelier devint photographe officiel de l'empereur.

    [5] François Boisjoly. Répertoire des photographes parisiens du XIXe siècle, Editions de l'Amateur, Paris, 2009.

    [6] Jean François et Pierre-Louis Pierson, tous deux natifs de Hinckange (Moselle) sont les fils d'un boulanger lui-même issu d'une longue lignée de ruraux locaux. Ils n'ont aucun lien de parenté avec la famille Pierson dont était issue Marguerite Pierson, épouse d'Etienne Pallu, qui a aussi une origine Lorraine mais dans la Meuse.

    [7] Orpheline et mineure, Victorine habitait au Vésinet, chez son tuteur M. Lurin (rentier) dont le domicile au 96 route de Croissy hébergera le couple Etienne et Victorine Marchand-Pierson à la belle saison.

 


Société d'Histoire du Vésinet, 2025 • www.histoire-vesinet.org