D'après E. Surget, "Marianne
Clouzot, musicienne du silence" (SHDS,
exposition 1995).
Marianne Clouzot, musicienne
du silence
Peintre, sculpteur, graveur, illustrateur,
Marianne Clouzot est née le 6 août 1908 au Vésinet, dans une vaste
villa louée par sa grand'mère, au 1, boulevard Carnot.
Dans le jardin du Vésinet, 1908
Marianne (à gauche) et son cousin Daniel, né comme elle au Vésinet en août 1908.
Sa santé délicate l'empêchant de fréquenter
l'école, elle passe dès lors des journées entières à dessiner. A 10
ans, elle vend ses premiers dessins par l'intermédiaire de la galerie
Devambez (la plus cotée de Paris). Conscient de ses dons et de son
amour pour le dessin, son père, Henri Clouzot célèbre critique d'art,
l'encourage et lui enseigne la technique de l'aquarelle.
En 1923, poussée par son père, Marianne Clouzot entre à l'Union centrale
des Arts décoratifs à Paris. Ses nombreux tableaux de l'époque reflètent
sa joie de vivre. Cinq ans plus tard, elle abandonne les arts appliqués
et s'initie à la peinture à l'Académie d'André Lhote. Elle participe à
de nombreuses expositions. Elle produit également des albums illustrant
des complaintes du folklore français.
En 1935, la galerie Charpentier lui ouvre ses portes pour une exposition
particulière. La presse est élogieuse. A partir de 1935, elle collabore
avec le couturier Jacques Heim; elle dessinera notamment pour lui des
décors de tissus jusqu'en 1960. En 1940, l'éditeur Henri Lefèvre demande
à Marianne Clouzot d'illustrer les Trois Contes de Francis Jammes.
Pendant cinq ans (1943-1948) elle collabore avec le céramiste Paul Pouchol.
Elle se partage entre la céramique et la gravure (elle grave une vingtaine
de livres pendant cette période) mais se passionne aussi pour le modelage.
Au début des années '50, tout en continuant à graver pour des éditions
de luxe, Marianne Clouzot commence une longue carrière d'illustrateur
de livres d'enfants, “travail sans gloire” selon elle mais qui constitue
cependant son unique ressource (85 volumes sont illustrés de 1950 à 1979).
Une mutation de son art “aimable et réaliste” (selon ses propres termes)
s'opère avec l'illustration du Cantique des cantiques.
Elle l'interprète dans un style épuré
et sensuel. Le livre étant refusé, Marianne Clouzot décide de l'éditer
elle-même. Tout en continuant à répondre à des commandes d'éditeurs,
elle illustre aussi des textes pour son plaisir tels que Métamorphoses
de Jupiter du poète Gabriel Audisio (1954), La jeune Parque de
Paul Valéry (1958) et les Elégies et sonnets de Louise Labé (1959)
petit livre précieux illustré, selon son habitude, à chaque page. Elle
illustre aussi les Notes algériennes et marocaines de Colette
(1960) et les Lettres de la religieuse portugaise de Marianna
Alcoforado. En 1961, son éditeur lui commande cinquante gouaches pour
illustrer au pochoir la Mireille de Mistral.
De 1969 à 1972, Marianne Clouzot anime
des émissions pour l'ORTF avant de revenir aux arts plastiques avec
la mosaïque. Mais l'encombrement et la difficulté du transport pour
les expositions lui font abandonner cette technique. Découvrant tardivement
l'art non figuratif, Marianne Clouzot se passionne alors pour les collages
abstraits en papier de couleurs (1974) puis des maquettes d'oiseaux
et de sirènes en métal découpé (1976).
Marianne
Clouzot en 1981
En 1978, elle se remet à la peinture à l'huile
en vue d'une exposition en Espagne. Puis, au début des années ‘80,
Marianne Clouzot revient à ses premières amours et compose trois albums
d'anthologie poétique sur les thèmes du Sommeil, du Miroir,
de la Chevelure. La double résonnance du texte et de l'image
l'enchante. La poésie reste le support privilégié de son inspiration.
Marianne Clouzot évoquait souvent sa ville
natale (et celle de son "jumeau", son cousin Daniel Clouzot
né 6 jours après elle, dans la même maison à laquelle elle était très
attachée. Elle s'y rendait régulièrement. Elle y avait "des relations",
et chaque année elle se rendait aux journées portes-ouvertes de l'école
de reliure de son amie Annie Persuy.
Marianne Clouzot s'est éteinte d'un arrêt
cardiaque le 23 juillet 2007, lors d'un séjour en Touraine dans sa
famille. Elle a été inhumée dans le berceau de sa famille, à Niort
où la Bibliothèque musée de la ville conserve les archives, écrits,
bibliogaphies et filmographies des divers membres de la famille Clouzot.
Depuis ses premiers dessins exposés pour la Victoire, en 1918, jusqu'au
bout, Marianne Clouzot a gardé son enjouement, l'acuité de son oeil,
la grâce de son trait, et la clarté de son regard. Tenant son Journal
intime depuis l'âge de neuf ans, elle dessinait encore, en mai 2007,
des motifs de foulards. Jusqu'au bout elle a gardé aussi sa jeunesse
d'esprit, son élégance d'allure et son sourire. Elle a exposé au musée
de Grandville durant l'été 2006, fait paraître deux ouvrages de bibliophilie
en novembre.
Son amie Michiko Tanaka, directrice à la retraite des éditions de l'UNESCO, collection
Patrimoine de l'Humanité, construit dans sa ville de Kobé, au Japon,
une Fondation Marianne Clouzot qui sera inaugurée en octobre 2008.
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En savoir plus :
De ses dernières années, retenons :
- Pierre Louÿs : Perviligium Mortis ; lithographies
Marianne Clouzot. Bordeaux, éd. Finitudes, 2001.
- Un film : Marianne Clouzot l'enfance de l'art, a été réalisé par
Jean-Noël Ray, produit par Michiko Tanaka et l'UNESCO en 2001.
- Quelques reproductions de la série de plus de deux
cent encres et dessins Métamorphoses d'un deuil, parus dans
la revue suisse Caravanes, n°10 en 2001.
- Marianne Clouzot par
Gilbert Birnbach, dans la Revue du bibliophile,
n°22, novembre 2002.
- L'exposition de livres publiés et inédits, en septembre
2004, à la librairie Arts et littérature, rue de Rennes, à Paris.
- Marianne Clouzot : allégeance à l'oiseau (graveurs
d'aujourd'hui) par Martin-Cassien, dans Les Nouvelles de l'Estampe,
n°196 octobre-novembre 2004.
- la parution, en 2005, de l'édition de luxe pour commémorer
le bicentenaire d'Andersen de La Petite Sirène, à l'Imprimerie
nationale, avec des pochoirs d'anciens dessins réalisés par l'Atelier
du Lys, ouvrage présent à la Réserve de la Bibliothèque nationale.
- La présentation autour de La Petite Sirène,
d'autres de ses livres d'enfant ainsi que des sculptures, dans le
cadre de l'exposition Ecumes de Mer, consacrée aux peintures
et livres d'art sur le thème de la mer, au Musée Anacréon Richard
de Grandville, du 24 mai au 24 septembre 2006.
- A l'automne 2006, la parution de Pandora et Le
Vin dans les sonnets de Ronsard où l'Atelier du Lys (Joseph
et Nicole Lichaa) a su traduire la verve de sa ligne au pochoir.
La
SHV remercie Martine Monteau pour sa contribution
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