Habitants célèbres du Vésinet > Michel Pacewicz >

L'Odyssée des Pacewicz, de la Galicie à la Galice

Michel Pacewicz (1803-1881), réfugié politique polonais

Michel Pacewicz est né en 1803 à Kouniouw, arrondissement de Kremieniec, dans la province de Volhynie à l'extrême sud-est de la grande Pologne, dépendant alors de l'empire Russe, aujourd'hui en Ukraine.
En novembre 1830, à l'annonce, fausse, que l'armée polonaise, requise par la Russie, allait réprimer les révolutions française et belge, la population de Varsovie se soulevait. L'armée polonaise se joignait aussitôt à l'insurrection. Mais la réaction russe à cette révolution polonaise, engageant des forces bien supérieures à la bataille d'Ostroleka, aboutit à la prise de Varsovie, en 1831. Il s'ensuivit une répression sévère ainsi qu'une russification systématique chassant de Pologne de nombreux patriotes qui trouvèrent bien souvent refuge en France, renforçant l'amitié franco-polonaise.
Michel Pacewicz fut un acteur du soulèvement de Varsovie et il trouva refuge en France.
Avec le statut de réfugié politique, il séjourna dans différentes régions françaises jusqu'à Château-Gontier, en Mayenne où il fit la connaissance de Mathilde Durand qu'il épousa le 10 juillet 1841. Elle était brodeuse et fille de tisserand. Leur premier fils, Stéphane Michel Jean, naquit dans cette ville le 19 octobre 1843.
A cette date, Michel Pacewicz est encore déclaré « réfugié politique polonais ». Deux ans plus tard, à Tours (Indre-et-Loire) le 30 septembre 1846 nait Stanislas, le second fils du couple Pacewicz-Durand. M. Pacewicz est alors « employé ».
La famille se rapproche de la capitale peut-être pour permettre aux deux frères de suivre l'enseignement de l'Ecole polonaise de Paris dont ils sortent diplômés, Stéphane, l'aîné, en 1860 et Stanislas, le cadet, en 1862.
L'aîné qui signe "Stéphane Pacewicz" mais qui est désigné sous le nom d'Etienne (Bulletin littéraire et scientifique de Association des anciens élèves de l'École polonaise ; annuaires, etc.) s'active beaucoup dans la communauté polonaise de Paris. La famille habite alors aux Batignolles, 14 rue Bénard. Etienne est « architecte dessinateur ».
L'ancien village des Batignolles est en plein bouleversement et beaucoup de ses habitants veulent fuir cet éternel chantier, lorsqu'ils n'en sont pas expulsés pour laisser la place à l'extension parisienne, aux lignes de chemin de fer.
Madame Mathilde Pacewicz née Durand, achète alors "avec son mari qui l'autorise" à la Société Pallu & Cie "une maison de campagne sise au village du Vésinet, commune de Chatou, route du village, n°15, comprenant un sous-sol, un rez-de-chaussée composé de salle à manger et cabinet, d'un premier étage divisé en trois chambres mansardées, le tout couvert en zinc, jardin planté d'arbres, dans lequel est un hangar, une basse-cour et deux bassins, le tout contenant superficiellement seize cent soixante-deux mètres quatre-vingt-dix centimètres environ ; tenant par devant la route du village, par derrière la voie du chemin de fer, d'un côté M. Foucard, d'autre côté M. Guyot..."
Monsieur Pacewicz [Pacewitz ou Paceviez, ou toutes les formes intermédiaires] est alors « fabricant de broderies ».
Le fils aîné Etienne/Stéphane est à cette date l'élève et le collaborateur de
Paul Abadie (1812-1884), architecte déjà réputé qui deviendra illustre en se voyant confier l'édification de la basilique du Sacré-Cœur quelques années plus tard. Abadie habite alors à Chatou, juste de l'autre côté de la voie ferrée, au n°1 de l'avenue Centrale. Cette collaboration durera six ans.
En 1865, le 11 novembre, la famille Pacewicz revend la maison de la rue du Village à M & Mme Bouilly au prix principal de douze mille francs, pour s'installer rue du Marché au n°22. Les deux fils, Stéphane et Stanislas, y sont domiciliés tous les deux comme « architectes ». On n'en saura guère plus sur Stanislas. Stéphane, quant à lui, quitte Abadie pour travailler avec Louis-Jules Bouchot (1817-1907) connu surtout pour avoir été l'architecte en chef de la Compagnie du PLM. On lui doit de nombreuses gares monumentales, en France et à l'étranger. Il fut aussi architecte du Théâtre de l'Odéon et du Ministère de la Guerre, boulevard St Germain.
Le 27 février 1878, Michel Pacewicz fils (sic) achète à Charles-Aimé Thomine, "le cabinet d'architecte que M. Thomine exploitait et faisait valoir au Vésinet, rue du Départ, n°2, ensemble la clientèle y attachée et différents objets mobiliers garnissant le bureau".
Si l'on retrouve la trace de plusieurs candidatures de Michel Pacewicz à des appels d'offres dans la proche région du Vésinet, ou à Paris, on ne lui connaît pas réalisation, hormis une surélévation rue de Calais, dans le 9e arrondissement.
Le 11 novembre 1880, Mathilde Durand meurt au domicile de son fils, 2 rue du Départ. Le 22 avril suivant, son mari la rejoint dans le caveau familial du cimetière municipal (Sec. 1, n°358). La communauté polonaise de Paris rendra hommage à ce vétéran de l'insurrection de 1830. En 1885 les frères Pacewicz sont radiés des listes de l'Association des anciens élèves de l'Ecole polonaise de Paris, ne donnant plus de nouvelles et n'acquittant plus leur cotisation.


1878


1881


1903

Michel Pacewicz (1843-1921) architecte

Michel "fils", qui semble avoir abandonné les différentes formes de son prénom pour faire usage de celui de son père, se fait un nom dans le milieu de l'architecture. En 1889, il participe à l'Exposition universelle de Paris.
Grâce à Benito Sanjuro un ami architecte d'origine espagnole qu'il connaît depuis 1872, lorsqu'il faisait ses études à Paris, Pacewicz se lie d'amitié avec des notables de Vigo, ville espagnole de Galice, sur la côte atlantique, non loin de la frontière portugaise ; une petite ville qui compte alors à peine plus de 20 000 habitants.
Pacewicz, va alors saisir sa chance et proposer à ses amis espagnols des projets ambitieux. Il commence par collaborer avec un architecte espagnol réputé : Jenaro de la Fuente qui lui prête sa signature, la sienne n'étant pas reconnue à Vigo. Il reçoit aussi le soutien de Miguel Dominguez, directeur des travaux municipaux à Vigo.
En 1897, il construit El Moderno (Policarpo Sanz, n°1). Initialement prévu comme un immeuble d'habitation pour le comte de Torrecedeira, Don Manuel Barcena Franco, il est devenu un hôtel à partir de 1906, puis aujourd'hui, le siège de la Banque de Galice.
La même année est édifiée l'Ecole des Arts et Métiers grâce au philanthrope promoteur José Garcia Barbon. C'est un excellent exemple du style néo-médiévaliste éclectique, d'inspiration parisienne, tant prisée par la haute bourgeoisie galicienne de cette époque.
En 1898 Pacewicz construit la Casa Salvador Aranda Graña (calle Concepción Arenal, nº1) et en 1900, la Casa Yañez pour Francisco Paulino Yañez. 

Michel Pacewics, qui exerce toujours au Vésinet rue du Départ, puis rue du Chemin-de-fer / 31, rue des Calêches à Chatou, épouse dans cette ville, le 19 février 1903, Anne Marie Traber, une alsacienne originaire de Willgottheim (Bas-Rhin), âgée de 42 ans, ancienne pensionnaire élève de l'Orphelinat des Alsaciens-Lorrains.
Dès l'année suivante, il emmène sa femme à Vigo où ils passeront de plus en plus de temps pour finalement s'y installer à demeure.
La crise économique consécutive à la guerre mondiale mettra un terme à la carrière de Pacewicz. Mais son œuvre, taillée dans le granit galicien, demeure et vaut à Miguel Paceviez (forme souvent rencontrée en Espagne) le respect et la considération des Olívicos, les habitants de Vigo.
Miguel Pacewicz meurt sans descendance, à Vigo, le 2 février 1921. Il est inhumé au cimetière de Pereiro.

    Principales sources:

    - Bulletin littéraire et scientifique de Association des anciens élèves de l'École polonaise de Paris (1866 et suivants);

    - Indicateur de la propriété foncière dans Paris et le département de la Seine (1888 et suivants); (Orthographe fluctuante Pacewiez, Pacewitz, Paceviez etc.);

    - L'Architecte constructeur. Revue du monde architectural et artistique (1890 et suivants);

    - Annuaire du bâtiment et des travaux publics, des matériaux de construction et du matériel d'entreprises (1903);

    - Archives de Me Rameau, avoué à Versailles (et La Concorde, 28 décembre 1865);

     


Société d'Histoire du Vésinet, 2011- www.histoire-vesinet.org