Extrait du Guide du voyageur
sur les bateaux à vapeur de Paris au Havre - Paris, 1841
[1]
Paris – Le Pecq
La première ligne de chemin de fer en
chiffres
Le développement du chemin de fer depuis
le point de départ jusqu'au point d'arrivée est de 18 430 mètres,
Un peu plus de quatre lieues et demie de poste. La différence de niveau
des deux extrémités de la ligne est de 8 mètres 71 centimètres. Il passe
d'abord sous la place de l'Europe par un souterrain de 264 mètres, se
déroule en tranchée jusqu'à l'aqueduc de ceinture voisin du mur d'octroi.
Il parcourt un nouveau souterrain qui le conduit au-delà de la rue de
la Paix, aux Batignolles, puis par dessous les boulevards extérieurs,
les rues des Dames et de la Paix, rentre en tranchée à 20 mètres de cette
rue, traverse celles de Saint-Charles et d'Orléans, sous des ponts construits
à niveau de ces rues et le prolongement de la rue Cardinet. Sous un autre
pont sur lequel passe le chemin de Monceaux à Clichy; arrive enfin en
ligne droite, par remblais, jusqu'à la Seine, à 120 mètres en amont du
pont d'Asnières. Là il passe le fleuve sur un pont de cinq arches de 30
mètres chacune.
L'alignement, parti des Batignolles, a, dans la commune d'Asnières, un
développement de 500 mètres environ, suivi d'une courbe de 2 365
m de développement, laquelle s'étend jusqu'au milieu de la garenne de
Colombe. Là commence un nouvel alignement qui se prolonge jusqu'à Rueil,
en traversant la commune de Nanterre où il y a une gare. Une courbe de
même rayon que la précédente raccorde cet alignement avec celui que nous
rencontrerons dans le bois du Vésinet, au-delà de Croissy et de Chatou;
Elle rencontre deux bras de la Seine, formés par l'île du Chiard, et les
traverse sur deux ponts, dont le premier a trois arches de 28 mètres chacune,
et le second, trois arches de 30 mètres.
L'alignement qui part du bois du Vésinet se prolonge jusqu'au Pecq, où
sur la gauche du pont, on trouve une gare monumentale, digne de l'embarcadère
de Paris, pour le départ et I'arrivée des voyageurs, avec un hôtel, un
restaurant et un café.
Les grandes courbes des Batignolles, de Colombe et de Nanterre, qui sont
de niveau ont toutes trois 2000 mètres de rayon. Les alignements des Batignolles
à Asnières, de Colombe à Rueil et du bois du Vésinet au Pecq, ont tous
trois une pente de 1 millimètre par mètre. Les ingénieurs ont voulu que
l'effort de traction nécessaire pour gravir ces pentes fût égal à celui
qu'il faut pour parcourir ces rayons, de niveau, égalité de traction qui
n'existe toutefois que dans le trajet de Paris à Saint-Germain, la force
nécessaire pour remonter de Saint-Germain à Paris devant être beaucoup
plus considérable, vu la différence de hauteur des deux extrémités de
la ligne.
Le cours de la Seine et la première
ligne Paris - Le Pecq
M.O. MacCarthy, 1841
Les besoins de la localité, la nécessité
d'amortir la rapidité des locomotives à l'entrée de Paris y ont fait descendre
le rayon des courbes à 900 et 800 mètres. Nous avons dit que la distance
de Paris au Pecq par le chemin de fer est de 18 430 mètres. Voici
comme cette distance se subdivise:
920 m |
de Paris
|
aux Batignolles, rue de la Paix. |
3 213 m |
— |
à Clichy, rue de Neuilly. |
4 549 m |
— |
à Asnières, rue de Courbevoie. |
6 904 m |
— |
à Colombe, route de Bezon. |
11 526 m |
— |
à Nanterre, rue du Collège |
13 661 m |
— |
à Rueil, chemin de Chatou. |
14 837 m |
— |
à Chatou, Chemin-Vert. |
18 430 m |
— |
au Pecq |
Le chemin a quatre voies dans Paris et
aux Batignolles, trois dans Clichy et Asnières jusqu'à la route d'Asnières
à Courbevoie, deux depuis cette route jusqu'au Pecq. Le chemin traverse
la Seine sur trois ponts, et les routes et chemins sur quinze.
Avant l'établissement du chemin de fer,
le nombre des voyageurs circulant entre Paris et Saint-Germain était de
320,000 chaque année par les voitures accélérées de St-Germain,
30,000 par les voitures de Poissy, 50 000 par les voitures particulières,
les coucous, les tapissières, etc. soit 400 000 voyageurs.
L'exploitation du chemin de fer, construit en deux ans, a eu pour résultat,
dans l'année 1839 un transport de 1 302 486 voyageurs, et une
recette de 1 211 425 frs 75 cent. Les dépenses totales
d'exploitation se sont élevées à 616 031 frs 25 cent. Les produits
nets ont par conséquent été de 595 394 frs 50 cent. Le nombre total
des voyageurs par le chemin de fer avait été en 1838 de 1 265 139.
Il s'est accru en 1839 de 37 347.
Depuis que le chemin de fer a perdu pour le public l'attrait de la nouveauté,
on a constaté que les voyages de promenades avaient diminué, tandis que
ceux qui résultent d'habitudes prises ou de relations d'affaires ont notablement
augmenté. Ainsi le nombre des voyageurs pour Saint-Germain a décru, en
1839, de 97 783, tandis que la circulation pour les Stations intermédiaires,
qui n'avaient donné que 155 668 voyageurs en 1838, en a produit 290 798
en 1839, c'est-à-dire 135 130 de plus que dans la première année.
La circulation totale du chemin de fer, pendant les dimanches de 1838,
avait présenté le chiffre de 349 823 voyageurs, et celle des six
autres jours de la semaine, dans le cours de la même année, celui de 915 314. En
1839, il y a eu diminution de 21 512 voyageurs les dimanches, et
augmentation de 58 859 les autres jours de la semaine. Ainsi les
dimanches ont donné 328 313 voyageurs, et les autres jours, 974 173.
Autrefois les bateaux à vapeur qui font le trajet depuis Rouen arrivaient
au quai d'Orsay à Paris, et, pour parcourir l'espace de 52 000 mètres
qu'il y a depuis Le Pecq, ou depuis Saint-Germain, ils n'employaient pas
moins de quatre heures. C'était un voyage, non seulement très long, mais
encore tout parsemé d'obstacles, tout hérissé d'écueils. Outre quatorze
ponts, sous lesquels il fallait passer et dont les arches étroites présentaient
de nombreux périls il y avait encore à se garer du pertuis de la Morue,
du resserrement des îles de Marly, des baissiers d'Argenteuil,
de Saint-Ouen, de Neuilly, etc. Aujourd'hui une partie de ces écueils
a disparu, grâce au travaux faits à divers ponts. et grâce surtout au
barrage mobile que ingénieur-en-chef Poirée a établi au pertuis de
la Morue, et qui, dans les basses eaux, permet aux bateaux de prendre
le bras de Marly, l'extrémité duquel il a disposé une écluse. Cet essai
a parfaitement réussi, et il est probable que le gouvernement appliquera
ce système à toute la partie de la basse Seine jusqu'à Rouen.
[1] Guide du voyageur sur les bateaux
à vapeur de Paris au Havre précédé d'une notice sur le chemin de fer de Paris à Saint-Germain et contenant la description géographique et historique des rives de la
Seine une carte dressée par M. O. Maccarthy et 70 vignettes dessinées par M. E. Breton, Paris - Aubert - Lavigne, (1841) 347 p. : ill. ; in-32 (BNF)
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