Bulletin municipal n°1, septembre 1965.

Urbanisme, où en sommes-nous ?
par Paul Didier, Adjoint au Maire, Ingénieur Civil des Ponts et Chaussées

Qu'est-ce que l'Urbanime ?
Je pense que l'Urbanisme est l'art d'organiser la cité, pour permettre à ses habitants d'y vivre dans les meilleures conditions matérielles et spirituelles. Cela suppose que la population y trouve les éléments du confort moderne dans un cadre harmonieux. Cela nécessite un plan d'ensemble, l'intervention de la commune pour assurer les services collectifs, et un minimum de discipline pour que chacun trouve la satisfaction de ses besoins dans le respect de ceux de ses voisins.

Le Vésinet a été un précurseur avec son premier plan d'urbanisme, constitué par le Cahier des Charges d'Alphonse Pallu (10 Mai 1863). C'était à l'époque une nouveauté. Il fut tout à fait suffisant jusqu à la fin de la première guerre mondiale.

Une première fièvre de construction se manifesta entre les deux guerres. Elle fit apparaître les insuffisances du Cahier des Charges, et la municipalité de l'époque eut le mérite, sous la direction du Maire Emile Thiébaut, de concevoir et de faire adopter le plan d'aménagement, d'embellissement et d'extension de 1937. Ce plan qui était alors un modèle du genre, s'inséra dans la réglementation plus générale de la Région Parisienne. Il contribua à donner au Vésinet son caractère de résidence urbaine baignée dans une oasis de verdure, qui fait son attrait et qui tient tant au cœur des Vésigondins.

Après la seconde guerre mondiale, une nouvelle fièvre de construction se manifesta, et de nouvelles insuffisances se révélèrent. Le Vésinet fut soumis aux pressions ouvertes ou occultes des promoteurs et de certaines autorités. Les dérogations commencèrent à proliférer et à engendrer les immeubles abusifs que la plupart des Vésigondins déplorent. De toutes manières, quel que fut le but désiré, il fallait repenser le plan d'urbanisme, d'autant plus qu'intervenait la publication du plan directeur d'urbanisme intercommunal N°28 (PUDI 28) qui concernait, avec Le Vésinet, dix autres communes de la Région, leur traçant un cadre nouveau et prévoyait l'établissement de plans d'urbanisme de détail. [1]

C'est pourquoi le règlement de 1937 fut mis en révision, sur proposition de la précédente municipalité, par un arrêté du Commissaire à la Construction et à l'Urbanisme pour la Région Parisienne en date du 7 Juin 1962. Cet arrêté décidait en outre la mise en application des mesures de sauvegarde prévues par un decret du 31 Décembre 1958. Un architecte urbaniste fut désigné, conformément à la réglementation, pour mettre au point le nouveau plan d'urbanisme.

C'est alors qu'apparut le divorce entre la population et une partie de ses représentants. Ce nouveau plan pouvait s'inscrire dans le prolongement des précédents, intervenant pour compléter le PUDI 28 et le règlement de 1937 dans la mesure où ils se révélaient insuffisants. En réalité, malgré un préambule apparemment fort rassurant, le projet mis sur pied organisait la « densification » de la commune, consacrant toutes les dérogations précédemment accordées, prévoyant l'extension des zones d'habitations collectives, l'augmentation de la construction en hauteur, et, en corollaire, l'élargissement de nombreuses voies communales pour permettre la circulation du supplément important de population appelé ainsi à résider au Vésinet.

Le Vésinet (Yvelines) – Le lac des Ibis, années soixante

Clichés de René-Jacques (1908-2003) photographe. Bibliothèques spécialisées de la Ville de Paris.

La population de la Région Parisienne augmente rapidement. Le problème du logement de cette population se pose avec accuité. Certains pensent que chaque commune doit prendre sa part de cet accroissement. Certes, il reste au Vésinet quelques possibilités d'absorption sans qu'elles nuisent à son site. Mais nous pensons qu'il est préférable d'urbaniser des zones encore désertes, ou construites en dépit du bon sens, plutôt que de saccager une ville qui a été pensée, et qui donne, dans l'ensemble, satisfaction à ses habitants. Je ne crois pas que nos voisins en prendront ombrage, mais qu'au contraire, ils seront heureux de conserver à leur porte notre petite oasis qui constitue aussi pour eux un pôle d'attractions, une source d'air pur et une protection contre l'étouffement. Sinon, il n'y a pas de raison de ne pas urbaniser aussi le Bois de Boulogne. On parle beaucoup de recréer des espaces verts. Préservons d'abord ceux qui subsistent.

Mais la procédure de révision est engagée, il faut la conduire à son terme. Nous nous sommes donc mis au travail pour présenter à la population un projet de règlement qui soit vraiment l'application des principes qui ont fait l'agrément du Vésinet et qui sont à la source de l'attachement des Vésigondins à leur commune. [3]

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    Notes et sources :

    [1] Une loi de 1959 rendait les communautés urbaines (districts) compétentes pour élaborer les documents d'urbanisme. Ce droit fut élargi et précisé par la loi du 31 décembre 1966 (relative aux communautés urbaines). Cette loi créant les communautés urbaines et les dotant obligatoirement de la compétence en matière de « plan de modernisation et d'équipements, plan directeur d'urbanisme intercommunal et plans d'urbanisme communaux, ceux-ci devant être soumis pour avis aux conseils municipaux intéressés ; constitution de réserves foncières intéressant la communauté ; création et équipements des zones d'aménagement concerté : zones d'habilitation, zones industrielles, secteurs de rénovation ou de restructuration. »

    [2] Pierre Merlin. Historique de la planification urbaine en france. Dans L'urbanisme (2013), pages 58 à 64.

    [3] Ce sera le Plan d'Urbanisme de Détail du Vésinet, Janvier 1970


Société d'Histoire du Vésinet, 2021 • www.histoire-vesinet.org