D'après Échos du Passé, Le Vésinet, revue municipale n°84 septembre 1988

Le Vésinet de A à Z
L'activité municipale de 1875 à 1890, ou les quinze premières années de l'existence légale de la commune
    par Eugène Bénard, secrétaire de mairie (1890). [1]

Dans sa préface, Bénard écrivait:

    Comment intituler ce résumé des actes des premiers administrateurs, cet abrégé d'archives? L 'Action communale? La Gestion municipale? la vie administrative? Peu importe. Il m'a semblé, à vingt ans, que de semblables répertoires périodiques faciliteraient les recherches.
    Les établir chronologiquement, avec une table? Ce serait fastidieux à compulser. L'ordre alphabétique, en groupant les chapitres par nature d'affaires, m'a paru préférable.

Après un rapide historique du Vésinet, suit la partie administrative où est classé, par ordre alphabétique, tout ce qui concerne la vie de la commune, de l'acte d'abandonnement au tarif des droits de voirie.
A la lettre B, on apprend que la bibliothèque créée en décembre 1881 est passée de 1 lecteur le premier mois de sa création à 215 en 1888 et qu'elle contenait, en 1889, 2151 volumes par 624 auteurs.
On découvre qu'un registre spécial existait à la mairie pour recevoir les déclarations des possesseurs de billards. [2]

La liste des conférences publiques et gratuites données dans la salle de gymnastique donne le nom des orateurs. On relève ceux de Frédéric Passy qui évoqua la vraie égalité et surtout de Raymond Poincaré qui intervint sur Camille Desmoulins. Bénard a résumé cette intervention :

Affiche de la conférence de Raymond Poincaré (1889)

Archives municipales du Vésinet (noter l'orthographe du prénom qui semble une coquille)

    L'orateur a entretenu son auditoire de Camille Desmoulins qui avait rêvé suivant ses propres expressions, une République que tout le monde puisse adorer, ce qui lui a donné droit à la reconnaissance de tous les hommes de liberté. Il est juste et agréable de dire que M. Raymond Poincaré a été digne du sujet. C'est avec une modestie pleine de bonne grâce, un tact et une élégance remarquables qu'il a conquis ses auditeurs et les a tenus, pendant plus d'une heure, sous le charme de sa parole. C'est M. Ledru [Maire du Vésinet à cette date], ami de collège de M. Poincaré, qui l'avait invité à venir dîner au Vésinet et à faire une causerie au profit de la Caisse des Écoles.

Illustration comique des courses au Vésinet

Collection privée, tous droits réservés.

Les courses sont bien évidemment évoquées. L'hippodrome occupait environ 19 ha, autour du lac des Ibis. Un article de l'Illustration de 1875, peu tendre pour Le Vésinet, est reproduit :

    Si invraisemblable que cela puisse paraître, on a couru dimanche dernier au Vésinet ; cette journée étant la clôture définitive et sans remise, on n'a peut-être pas eu tout à fait tort, car s'il eut fallu la remettre, Dieu sait quand elle aurait pu avoir lieu ; les choses ne se sont, d'ailleurs, pas autrement mal passées, grâce à la précaution de balayer les abords des obstacles, il n 'y a pas eu plus de chutes que de coutume. Le Vésinet est très commode sous ce rapport, c'est une sorte d'hippodrome en chambre, où l'on peut faire à peu près ce que l'on veut. Au besoin il serait possible de le couvrir et de le convertir en une sorte de skatingrink des courses, sauf les patins à roulettes dont les chevaux s'accomoderaient mal. Quant aux spectateurs, ils ressemblaient un peu à des Lapons en voyage, ou à un convoi de prisonniers en partance pour la Sibérie. La piste offrait l'aspect assez pittoresque d'un tableau de Diaz très bien réussi.

Les tribunes du champ de courses au Vésinet

Collection privée, tous droits réservés.

Une circulaire du maire du 7 décembre 1876 invitait les habitants à faire procéder à la destruction des nids de chenilles dans leurs propriétés. Le délai de rigueur était fixé au 20 février 1877.
Pour les pelouses, l'auteur signale l'arrêté du 18 mars 1878 pris pour remédier à l'abus de traverser les coulées et pelouses qui font l'honneur du pays et qui faisait... défense de traverser les coulées et pelouses, qui sont la propriété de la commune.

Les statistiques agricoles de 1882 nous apprennent que les bois et forêts recouvrent 230 ha, les jardins de particuliers 8, les jardins de plaisance et les parcs 150, les pelouses 30 ha. La deuxième partie de l'enquête était réservée aux animaux : 38 chevaux entiers de 3 ans et au dessus, employés en travail et peu ou pas à la reproduction; 50 chevaux hongres de 3 ans et au dessus; 28 juments et ...70 chèvres !
les animaux de basse-cour comptent 250 poules, 30 canards, 100 pigeons et 200 lapins.
La rubrique Fête communale nous rappelle que la fête de la Marguerite se tenait alors vers le 20 juillet.
La commune était autorisée à paver le trottoir devant l'entrée de la mairie en 1879 et à construire le mur de clôture le long de la route de Chatou (l'actuel boulevard Carnot) l'année suivante.
Enfin, pour le cantonnement des troupes, le maire avait dressé un état des ressources que présentait la commune. Il ressortait que 600 hommes pouvaient être cantonnés avec 30 chambres pour les officiers, 200 lits pour la troupe, 50 places pour les chevaux et 25 pour les voitures.

 

Mairie du Vésinet — Dessin aquarellé de Eugène Bénard (1890)

Archives municipales.

 

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    [1] Eugène Edouard Bénard (1868-1939). Officier de l'Instruction publique, médaille d'or de la mutualité française, médaille d'honneur communale, Eugène Bénard fut, durant de longues années, secrétaire général de la commune. Il est à l'origine des armoiries (héraldiques) de la Ville dont il eut, semble-t-il du mal à faire reconnaître la paternité. Il dressa aussi la liste des noms des propriétés du Vésinet qui, longtemps, servirent d'adresse à leurs occupants. Il fut enfin « l'inamovible secrétaire » de la Prévoyance (Société de secours mutuels du Vésinet). On conserve aussi de lui une remarquable aquarelle de la Mairie peinte peu d'années après l'édification du bâtiment (ci-dessus). Son travail et ses écrits seront souvent cités dans nos pages.

    [2] Une loi du 16 septembre 1871 pour faire face au déficit budgétaire engendré par les conflits armés, prévoyait une taxe sur les billards traduisant la volonté du gouvernement français de taxer « le plaisir ». Emmanuelle Burgaud. Revue historique de droit français et étranger (Dalloz). 84:1, 2006 pp. 87-102.

 


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