D'après H.B. pour Le Quotidien, 23 novembre 1923 et autres sources La Villa Trianette au Vésinet Au cours de l'année 1922, plusieurs articles de réclames firent état de l'installation, au Vésinet, d'un établissement destiné à accueillir, pour une somme modique, des jeunes filles souhaitant prendre au calme et en sécurité, quelques jours de repos. Pour la somme de sept francs par jour, les étudiantes, les femmes professeurs, les institutrices, etc. trouveront, à la villa Trianette, 2, avenue Rembrandt, au Vésinet (Seine-et-Oise), une chambre claire, une nourriture saine, l'agrément d'un beau jardin. [1] Les jeunes filles qui se préparent à une carrière libérale ou qui l'exercent déjà (étudiantes, professeurs, écrivains, infirmières, secrétaires, etc.) seront heureuses d'apprendre qu'une maison de repos est ouverte toute l'année à celles d'entre elles qui sont fatiguées ou qui ont besoin d'une villégiature réconfortante dans un air pur. [2] Cette Maison de repos pour les universitaires appartenait à une œuvre charitable fondée par une ancienne vésigondine, Théodora (Dorine) Leclerc de Pulligny [3], dont la villa Trianette avait été, durant une vingtaine d'années, la villégiature. La propriété occupait alors un domaine composé de six parcelles du Lotissement général initial, sur une superficie de près d'un hectare [lots 19 à 24 de l'îlot 4]. Villa Trianette, 2 avenue Rembrandt, Le Vésinet (Seine & Oise) Gare  : Le Pecq - Téléphone  : 59.   Villa Trianette –  Le Repos de la Jeune Fille – Le Vésinet ...une villa toute blanche au fond de son parc. En 1923, un article publicitaire un peu plus étoffé donne quelques précisions sur le fonctionnement du foyer et sur le décor offert aux jeunes pensionnaires : [4] Une Maison de Repos pour Jeunes Filles et il ne leur en coûte que huit francs par jour.   «  Il faudrait du repos, quelques semaines de grand air et de calme.» Telle est la recommandation du médecin, le conseil des vieux amis qui s'inquiètent de voir, pâle et maigri, un visage de jeune fille. Mais du repos, ce repos désiré et indispensable, comment le trouver ? Où prendre dans un budget d'étudiante ou d'employée de commerce les sommes nécessaires à un séjour à la campagne ? La moindre petite pension demande au moins 15 francs par jour, et encore à condition d'aller loin et de faire les frais d'un long trajet. Une œuvre cependant est prête à répondre à ces besoins, œuvre peu connue parce qu'elle répugne à une publicité qui s'apparenterait aux hôtels et aux pensions de famille, alors que dans l'esprit de ses créateurs, elle doit être une maison familiale où les jeunes filles isolées trouvent un peu de l'accueil que des parents feraient à leur lassitude.   Une pensés délicate Dans une des paisibles avenues du Vésinet, qui semblent enroulées, autour des jardins, où un rouge soleil d'hiver éveille encore les teintes somptueuses de l'automne, une villa toute blanche au fond de son parc  : la villa Trianette. C'est là qu'une délicate pensée a abrité l'œuvre du Repos de la jeune fille. En souvenir d'un deuil cruel, pour épargner à d'autres mères le désespoir de voir disparaître en pleine jeunesse une enfant bien aimée, une généreuse fondatrice, Mme de Pulligny, voulut que la maison des jours heureux fut désormais ouverte aux jeunes filles pour dissiper la fatigue née du travail et des privations. En possession déjà du local, de cinq chambres toutes meublées, l'œuvre put bientôt — grâce notamment à l'activité de Mme Charles Salomon, sous-directrice du Collège Sévigné — recevoir ses premières pensionnaires. Les demandes se multiplièrent rapidement. Il fallut installer de nouveaux lits, tirer parti de toute la place disponible.   Huit francs par jour  ! Aux vacances surtout, les jeunes filles accourent nombreuses. C'est qu'elles trouvent là la possibilité de passer quelques semaines au grand air pour huit francs par jour. Vous entendez bien : huit francs par jour. Et ce prix comporte, avec la chambre, le chauffage s'il y a lieu, l'éclairage, trois bons repas et même le goûter. Une consultation médicale écarte à regret quiconque menacerait d'un risque de contagion et toute cette jeunesse saine s'ébat ou se repose librement tout le jour. Rien n'est moins « pension », d'ailleurs, que ce hall simple, mais percé de lumière de part en part et où, entre les vitres que rend imperceptibles la demi-brume de novembre, on se croirait en un coin du parc miraculeusement préservé du froid. Au bas du perron, de petites tables de bois évoquent la joie des flâneries du matin sur les pelouses mouillées et le retour par les allées où les pieds s'alourdissent de paquets de feuilles dorées. Mais voici venir à moi la directrice, Mme Chaudié  : une figure extraordinairement mobile, qui rayonne l'encouragement, le goût de la vie et un sourire maternel qui doit tout de suite gagner la confiance. Nous visitons des chambres ornées de cretonnes claires et de meubles blancs et semées à travers les étages avec cette fantaisie charmante des maisons familiales où chacun trouve son coin, mais où l'on campe volontiers sur des lits pliants pour être plus nombreux et plus gais.   Pour mettre l'œuvre à la portée des moins fortunées D'une fenêtre, j'aperçois au fond du parc un tennis et un vaste potager où l'on ira soi-même cueillir la salade du dîner. Nous recevons beaucoup d'étudiantes, me dit Mme Chaudié, parce qu'elles disposent assez librement de leur temps. Mais la maison est ouverte à toutes les catégories de jeunes filles. Pour nous adapter aux nécessités de toutes les professions nous acceptons même qu'on ne vienne que du samedi au lundi. En cette mauvaise saison, j'ai encore des pensionnaires fidèles. Parmi elles, une convalescente qui se remet d'une appendicite récente, une étudiante en droit qui met la dernière main à sa thèse. Nous voudrions être plus nombreuses en toutes saisons. Nous avons encore un pavillon prêt à être aménagé. Mais c'est moins du développement de l'œuvre que se préoccupe Mme Chaudié que des moyens d'en mettre le bénéfice à la portée des moins fortunées : Il faudrait des bourses permettant des séjours un peu longs. C'est vrai. Huit francs, c'est bien peu de chose  : le confort d'une course en taxi, une tasse de thé prise en passant. Mais pris chaque jour sur un maigre budget de jeune fille, lorsque continue à courir la location d'une chambre qu'on n'ose laisser échapper et qu'aucun gain ne vient compenser ces dépenses, cela représente toute une somme. C'est pourquoi il faut souhaiter que des bourses soient promptement créées. Mais il faut souhaiter aussi que tant de jeune insouciantes, qui songent trop peu à leur santé, sacrifient de temps en temps une soirée au théâtre, un chapeau et même un livre pour aller se reposer quelques jours à la Villa Trianette. Quand elles y auront retrouvé l'odeur vivifiante du jardin, la joie saine de la campagne, ce n'est pas par sagesse seulement qu'elles y retourneront. H.B. En 1924, l'œuvre reçut le Prix Thorlet (1000 frs) remis par l'Académie des Sciences Morales et Politiques.  [5] Les revenus de la Fondation Thorlet, sous l'égide de l'Institut de France, étaient destinés à la distribution biennale de prix de toutes sortes (prix de vertu, prix d'encouragement pour des œuvres sociales ou d'érudition en histoire ou en art). Dans les comptes-rendus des séances de l'Académie pour 1924, on peut lire : ...Enfin, nous avons jugé digne d'attention le Repos des jeunes filles, association qui a pour objet l'organisation d'une maison à la campagne destinée à recevoir les jeunes filles se préparant à une carrière libérale ou l'exerçant déjà, et ayant besoin de repos : étudiantes, professeurs, infirmières, secrétaires, etc. Cette maison de campagne, nommée Trianette, est située, 2, avenue Rembrandt, au Vésinet (Seine-et-Oise). Les rapports annuels qui nous ont été soumis indiquent que l'œuvre rend de précieux services et mérite d'être encouragée. Votre Commission vous propose donc d'attribuer la part principale du prix, soit deux mille francs, au Groupe d'Œuvres sociales de Belleville une récompense de mille francs à l'Action sociale de la femme, et une récompense de mille francs également au Repos des jeunes filles (en la personne de Mme Lucie Siegfried, présidente de l'Œuvre). [6] De 1926 à 1928 l'établissement est recensé par l'Organe catholique des œuvres de jeunesse (édition pour jeunes filles). Les tarifs ont été ajustés : 10 frs en été, 11 frs en hiver 1926 (13 frs en 1928), et l'on y accueille toujours les étudiantes, institutrices, infirmières, carrières libérales, des jeunes filles ... de 18 à 40 ans. [7] ***** Notes et Sources : [1] Le Radical, 23 juillet 1922. [2] Le Gaulois, 8 juillet 1922. Repris dans " L'Enseignement secondaire des jeunes filles, revue mensuelle (directeur Camille Sée) juillet 1922. [3] Théodora Lucassen (1860-1922), fille d'un riche négociant néerlandais, était l'épouse de Jean Marie Leclerc de Pulligny (1859-1939) tous deux enterrés au cimetière du Vésinet. Jean de Pulligny était un polytechnicien, diplômé de l'École nationale des ponts et chaussées. Ingénieur-général des ponts et chaussées, chef de bataillon du génie militaire pendant la Première Guerre mondiale (officier de la Légion d'Honneur) il est décrit comme " franc-maçon, rationaliste, leplaysien dissident et inventeur" . Il fut conseiller municipal au Vésinet de 1900 à 1904, très actif si l'on en juge par les articles de la Gazette du Vésinet. [4] Le Quotidien, 13 novembre 1923. [5] Le Quotidien, 18 mai 1924. [6] Séances et travaux de l'Académie des Sciences morales et politiques, n°7 (juillet), 1924. [7] La Vie au patronage, numéro 1, 1926.  
Société d'Histoire du Vésinet, 2020 •  histoire-vesinet.org |