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Catherine Brilli (1934-2024)
Directrice du Conservatoire de Musique et de Danse du Vésinet (1976-81 et 1989-99)

Catherine Huguette Georgette Chouillier est née à Paris (16e) le 21 février 1934. Ses parents, Maxime Chouillier [1] et Jacqueline Brilli sont tout deux musiciens, lui pianiste et compositeur, elle violoniste virtuose. Le couple se séparera en 1937. Devenue musicienne concertiste, Catherine choisira l'instrument de son père, le piano, mais le nom de sa mère « Brilli » comme nom de scène. Elle passera son enfance entre sa mère et son beau-père, André Girard, chef d'orchestre qui a épousé Jacqueline Brilli en 1942.
Entrée au Conservatoire national supérieur de musique de Paris à l’âge de dix ans, Catherine Chouillier obtient une première médaille de solfège supérieur et une première médaille de piano, avant de remporter à seize ans le premier prix de piano à l'unanimité. Elle recevra ensuite une première médaille de musique de chambre à l'unanimité, une médaille d'harmonie, ainsi qu'un deuxième prix de musique de chambre…
En 1950, lors de l'une de ses premières performances en concert, la critique lui reconnait « un tempérament musical exceptionnel dans l'interprétation de L'étude n°4 de Paganini-Liszt, et les pièces enfantines de Bela Bartok ».

Catherine Chouillier au piano au Conservatoire National de Musique de Paris, en 1944.

Classe de piano de Mme Lucette Descaves. Debout derrière Catherine, le jeune Michel Legrand.

Collection Patricia Gauci-Clédat. Tous droits réservés.

 

Catherine Chouillier en 1947 au Conservatoire National de Musique de Paris

(marquée d'une croix)

 

Catherine Brilli vers 1960 avec son chef d'orchestre, Jean Giraudeau (1916-1995)

Collection J. Golgevit. Tous droits réservés.

Le 21 juin 1958, Catherine Chouillier a épousé à Dijon (Côte d'Or) Michel Gauci [2].
Diplômée d'histoire de la musique, elle choisit la carrière de concertiste, puis de professeur lorsque sa vie familiale au Vésinet lui fait renoncer à de trop fréquents déplacements à l'étranger.
Elle est professeur de piano au Conservatoire du Vésinet, présidente directrice de la Chorale Elisabeth Brasseur à partir 1972, fonction qu'elle conservera 10 ans. Elle est aussi membre de la Commission des chorales et maîtrises au Secrétariat d’Etat aux Affaires culturelles. Intéressée par la musique ancienne et claveciniste dans l'ensemble polyphonique de l'ORTF et a effectué des tournées et enregistré des disques avec cette formation. Enfin, chef de chant et assistante de chef d'orchestre, elle fut auprès de noms prestigieux aux festivals d'Aix-en-Provence, d'Albi et de grands théâtres européens.
Catherine Brilli enseigne dans les conservatoires de la ville de Paris où elle fait partie des commissions pédagogiques lorsqu'en 1976, elle est sollicitée par André Gosset pour lui succéder à la direction du Conservatoire de Musique et d'Art dramatique du Vésinet, fonction qu'il occupe depuis la fondation de l'établissement en 1970 [3].

Le Conservatoire de Musique du Vésinet

 

Entre les années 1930 et 1950, il y avait au Vésinet une annexe plus ou moins dynamique et active du conservatoire de Saint-Germain-en-Laye, le Conservatoire Debussy, fondé en 1920, devenu municipal en 1947 et de nos jours dit « à rayonnement départemental ». En 1970, sous l'impulsion de André Gosset (1921-2017) la ville du Vésinet se dota d'un Conservatoire municipal de Musique. Il fut d'abord installé dans des locaux vacants du Groupe scolaire Princesse puis, très vite, dût trouver d'autres locaux complémentaires à l'école des Merlettes et au Centre des Arts et Loisirs pour répondre aux besoins. Des 180 élèves de l'origine, les effectifs dépassaient les 400 cinq ans plus tard et les 6 disciplines musicales du départ devenaient 14 au cours de la même période. Quant au corps professoral (d'une exceptionnelle qualité avec la plupart des professeurs pourvus des titres prestigieux d'anciens premiers prix du Conservatoire National Supérieur de musique de Paris) il passait de 8 à 25. Au fil des années, tandis que s'affirmait sans cesse davantage son audience et son rayonnement, notre Conservatoire s'enrichissait d’un cours d'art dramatique en 1975, prenant très naturellement le nom de Conservatoire de Musique et d'Art dramatique du Vésinet. Et en 1977 il intégrait un cours de danse classique dirigé par Jacqueline Rous. L'Académie de Danse classique que dirigeait au Vésinet Jacqueline Roux était l'héritière de l'Ecole de Musique et de Danse fondée au Vésinet dans les années '50 par Clara Erb, pianiste virtuose, qui dispensait des cours et leçons particulières. Jacqueline Rous, professeur « diplômée par l'Association Française des Maitres de Danse Classique » (selon les documents diffusés par l'École) était la fille de la fondatrice. [4]

Le Conservatoire municipal de Musique et de Danse se devait de disposer de locaux compatibles avec ces nouvelles disciplines aussi fut-il installé au 51, boulevard d’Angleterre, dans une propriété acquise par la Ville,en 1978, où la Société Suez entreposait ses archives depuis de nombreuses années. Ce nouveau Conservatoire fut inauguré le 30 septembre 1981. Il disposait de douze salles permettant l'enseignement de treize différents instruments et d'un auditorium. Il a vu naitre aussi, une Harmonie municipale, héritière de deux sociétés musicales disparues, issues du Conservatoire: l'Accord parfait et l'Étendard. [5]

Le 11 juin 1976, lors de la soirée au cours de laquelle les élèves et le corps professoral du Conservatoire faisaient, sous l’égide de la Ville, leurs adieux à leur directeur-fondateur, André Gosset, sa succession fut évoquée. « Aidé de tout le corps professoral, il a soigneusement cherché le successeur qui continuera son œuvre. C'est un sourire de femme qu’il a trouvé et proposé, un sourire de femme musicienne, dont les titres et la carrière sont déjà garants de la réussite, de femme ayant le talent de diriger et d'organiser. Son choix s'est porté sur Catherine Brilli qui prendra ses fonctions le 1er septembre. » [6] Suivait un court aperçu de la carrière que nous avons exposée ci-dessus, et le maire concluait : « Passionnée par l'enseignement, proche de la jeunesse, vivant pour la musique, elle mènera sa nouvelle tache avec l'enthousiasme qu'on lui connaît. »
C'est sous sa direction que la plupart des évolutions majeures et la décision du déménagement et de l'agrandissement furent prises.
Les résultats de l'examen public clôturant l'année 1980-1981 sont très satisfaisants. Un jury composé de personnalités éminentes de la musique dont de nombreux premiers prix du Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, marque par les récompenses qu'il accorde la qualité du Conservatoire. L'assiduité, un des éléments importants de sa réussite, est un des premiers points particulièrement remarqués, puisque 333 élèves passent cette année-là l'examen et de nombreuses mentions sont accordées, aussi bien dans les niveaux Débutants que dans les niveaux Moyen 1 et Moyen 2.
« Ces résultats marquent la parfaite gestion et la qualité de l'enseignement dues aussi bien au magnifique corps professoral de notre Conservatoire qu'à la direction que Madame Catherine Brilli a assurée pendant quatre ans » déclare le maire dans son allocution et il annonce : « Madame Brilli, appelée à des fonctions importantes au Conservatoire de la Ville de Paris où elle aura la responsabilité d'une classe de piano dite « Pilote » destinée à former des musiciens professionnels, a demandé à être libérée de ses fonctions à partir du 1er octobre 1981 ; son affabilité et cependant sa grande rigueur dans la direction de notre Conservatoire la feront regretter à la fois des élèves, des familles et des professeurs. Le Conseil d'Administration du Conservatoire a tenu à rendre hommage à son action.» Et il précise encore : « Madame Brilli ne nous quitte cependant pas complètement, puisque, si elle va exercer ses nouvelles fonctions à Paris, elle reste Vésigondine et les occasions de participations à l'activité du Conservatoire de notre Ville ne manqueront pas de se rencontrer. » [7]
Le nouveau directeur, Jean-François Fabe, entre en fonction le 1er octobre 1981. [8]

Catherine Brilli en 1981, au terme de sa première période de direction du Conservatoire du Vésinet,

reçoit la médaille de la Ville des mains du maire Alain Jonemann. (Revue municipale)

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Catherine Brilli reviendra quelques années plus tard, en 1989, assurer pour dix ans de plus la direction de notre Conservatoire.
Musicienne, professeur, chroniqueur spécialisé à la radio, Catherine Brilli évoque avec émotion l'aménagement du conservatoire et son travail avec les architectes, notamment concernant la sonorisation. Revenue au conservatoire en 1988, après quelques années occupée à d'autres missions, Catherine Brilli déploie un bel enthousiasme, séduite par les techniques pédagogiques nouvelles, par l'élaboration de méthodes propres à séduire les enfants. Elle livre pour le magazine municipal une sorte de profession de foi :

    Le Conservatoire : une école de respect et d'humilité

    Nous vivons l'une des rares époques où l'on ne joue pas la musique de notre temps. Le Requiem a été écouté du vivant de Mozart. Pourtant, explique Catherine Brilli, directrice du conservatoire, les Français, plus qu'autrefois, se sentent concernés par la musique, qui loin de s'afficher uniquement comme phénomène de mode, reste pour les musiciens, musicologues, mélomanes ou au contraire, simples élèves de conservatoire, une école de respect et d'humilité.

    Toutefois, nous conservons le solfège comme base d'étude. Il s'agit là d'un code incontournable. […] La musique s'étend à toutes les catégories socio-professionnelles, donnant ainsi accès à la musique à chaque enfant qui le désire. Plus sociale qu'auparavant, la musique débouche sur une connaissance qui développe de grandes qualités humaines. C'est important, de connaître le langage musical. Malheureusement, on assiste à un dérapage. La musique écrite aujourd'hui est celle du 21ème siècle. Trop contemporaine, trop difficile, elle ne suscite pas d'écoute de la part du grand public. Au conservatoire, nous proposons aux enfants, les styles les plus divers, avec parfois l'étude d'une œuvre unique qui durera toute l'année.

    Trois cent vingt élèves se répartissent dans 16 disciplines auxquelles s'ajoutent la chorale et le chant lyrique. A cet égard, certains enfants préfèrent la chorale à l'instrumentation. Il doivent se laisser porter par leurs désirs.

    A partir de cinq ans, on propose au futur petit musicien, un éveil, une initiation. Il étudie le rapport du son avec les bruits de notre vie, sa durée, sa hauteur. A six ans, l'enfant commence à appréhender la lecture musicale, il s'intègre à de petites orchestrations (tambourins … ). Sept ans marque l'âge de la véritable formation musicale. D'ailleurs, je souhaite développer la musique en groupe …[9]

Comme d'autres équipements culturels et sportifs de la ville, le conservatoire suscite des vocations et quelques futurs professionnels (peut-être) se sont notamment présentés au Conservatoire national de région de Boulogne-Billancourt. Et Catherine Brilli précise :

    […] les très bons élèves de conservatoire sont généralement aussi de brillants collégiens ou lycéens. Vouloir réussir à la fois une "prépa" et le conservatoire relève d'un véritable défi. Et lorsque le choix s'opère, vous savez bien ce que choisissent les parents. Pourtant il y a beaucoup de débouchés dans les professions de la musique. Nous faisons même appel à l'étranger. Avis aux amateurs ! Plaisir ou profession, le conservatoire reste un lieu éminemment vivant, tourné vers les écoles, vers l'extérieur et si musique a souvent été synonyme de "saltimbanque", c'était au sens noble du terme. [10]

En 1993, Catherine Brilli, est élue membre du Conseil d'administration de l’Union des Conservatoires des Yvelines et le Conservatoire du Vésinet est choisi comme centre d’examen pour les épreuves centralisées de piano et de flûte. Près de deux cents candidats venant de tous les conservatoires des Yvelines ont donc pris le chemin du Vésinet, l’organisation et le choix du jury incombant entièrement au conservatoire de notre commune.[11] Elle a fait partie du bureau du Syndicat National des Artistes, Chefs d'orchestre, Professionnels de Variété et Arrangeurs (actuel SNACOPVA) et des jurys de concours divers de piano. [12]
En 1997, elle obtient pour son établissement l'agrément du ministère de la Culture, distinction très rare dans une ville de moins de 20.000 habitants. Le budget doit avoisiner les 2 Millions de frs en 1998 soit, compte tenu des recettes, une charge résiduelle pour la Ville de 715 900 frs (coût par foyer fiscal de 113 frs). [13]

En 1999, Catherine Brilli, arrivée à l'âge de la retraite, quitte ses fonctions de directrice au Vésinet ainsi qu'au Conservatoire du 10e arrondissement de Paris où elle enseignait le piano et formait des élèves pour l'entrée au CNSM. Elle continuera d'enseigner encore pendant quelques années au sein de l'association des cours d'adultes, rattachée au Conservatoire du 10e arrondissement.

En 1999 (à gauche) et en 2000, Catherine Brilli reçoit les témoignages de reconnaissance du Vésinet.

Elle reçoit la médaille d'argent de la ville des mains du maire Alain-Marie Foy et le maire adjoint en charge de la Cluture déclare :

« Vous avez marqué de votre empreinte notre conservatoire, grâce à votre charisme et à vos compétences. »

A la rentrée 1999, c'est Guy-Jacques Borderieux, percussionniste, qui prit la direction du Conservatoire du Vésinet. « A la fois mélomane, musicien et pédagogue, ce nouveau dirigeant est titulaire de nombreux prix de 1er, 2e et 3e cycles » précisait Le Vésinet-la revue d'octobre 1999.[14].
Le 19 novembre 2000, près de 800 spectateurs emplissaient la salle de spectacles du théâtre pour un « rendez-vous familial » qui marquait le trentième anniversaire du Conservatoire, une soirée durant laquelle se sont succédé musiciens, groupes musicaux et chorégraphies.
Domiciliée à Sartrouville, veuve depuis le 26 décembre 2017, Catherine Brilli est décédée le 5 août 2024, à 90 ans.

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      Notes et sources:

      [1] Maxime André Raymond Chouillier, né le 10 août 1909 à Paris (17e) est un pianiste et compositeur français. Marié à Jacqueline Brilli en 1933 et divorcé en 1937, il s'est remarié à Francine Sors en 1938. Il est mort à Avignon en 1973. La ville de Carrières-sur-Seine lui a dédié un square.

      [2] Michel Gauci, né à Dijon (Côte d'Or) le 28 janvier 1934, a épousé Catherine Chouillier (dite Brilli) dans la même ville le 21 juin 1958. Déjà célèbre à 20 ans en Bourgogne, membre du Vespa-Club Dijonnais, il avait réalisé en 1954 un voyage en solitaire, en Vespa, jusqu'en Laponie. Il est mort à Sartrouville où le couple était domicilié depuis de nombreuses années, le 26 décembre 2017. Leur fille, Patricia Gauci (épouse Clédat) est elle aussi musicienne (contrebasse). Elle a été professeur au conservatoire du Vésinet de 1984 à 2014 où elle a enseigné trois disciplines : le chant choral, la formation musicale et la contrebasse.

      [3] André Gosset, né le 8 janvier 1921 à Boulogne-sur-Mer (62) mort à Saint-Germain-en-Laye (78) le 30 juin 2017. Premier prix de trombone à 16 ans, élève du Conservatoire de Paris où il accumule les prix et les distinctions. Musique de l'Air (1939), premier soliste à l'Opéra-comique (1950). Il a également joué avec les plus grands noms du Jazz.

      [4] Clara Müller épouse Erb (1901-1994) d'origine allemande, avait fondé et dirigé au Vésinet plusieurs écoles de musique puis de Musique et de Danse classique. Sa fille, Jacqueline Rous, elle-même danseuse, lui avait succédé au début des années '60 à la direction de l'Académie de Danse classique du Vésinet avant de prendre en charge le Cours de Danse du Conservatoire en 1978. En 1996, Natacha Rumack, jusque là son assistante, lui succéda.

      [5] Madame Catherine BRILLI succède à M. André GOSSET. Les Adieux du Conservatoire à son Directeur. Bulletin municipal, n°35 juin 1976.

      [6] Il existe 4 niveaux de Conservatoires : Notre conservatoire Georges Bizet est un CRC (Conservatoire à Rayonnement Communal). Celui de Saint Germain-en-Laye est un CRD (Conservatoire à Rayonnement Départemental). Celui de Poissy est un CRI (Conservatoire à Rayonnement Interdépartemental). Les CRR (Conservatoire à Rayonnement Régional) les plus proches sont à Rueil-Malmaison, Boulogne-Billancourt et Cergy-Pontoise.

      [7] Le Vésinet revue municipale, n°56, septembre 1981.

      [8] Jean-François Fabe : fondateur et animateur de l'Opéra de Chambre et ensemble madrigal d'Ile-de-France. Après avoir obtenu au Conservatoire National Supérieur de Paris, un premier prit d'Art Lyrique et deux premières médailles de Solfège et d'Histoire de la Musique, il a mis en scène plusieurs ouvrages lyriques et œuvres dramatiques dans de nombreuses villes de France telles que Strasbourg, Nantes et Lille. Le Vésinet revue municipale, n°57, décembre 1981

      [9] Vivre au Vésinet Magazine, n°94, décembre 1991.

      [10] Vivre au Vésinet Magazine, ibid.

      [11] Culture: Le Conservatoire. Vivre au Vésinet, n°17, septembre 1993.

      [12] Patricia Gauci-Clédat, communication personnelle, 2025.

      [13] Selon un calcul effectué en 1990, « financièrement parlant », chaque enfant revenait alors à un peu plus de 6 000 frs par an. La Ville couvrait 50% de cette dépense par le biais de subventions. A noter, la volonté d'alors du maire Alain Jonemann de ne pas dépasser ce pourcentage de 50%, ce qui qui impliquerait dans cette charge, les Vésigondins n'ayant pas d'enfant.

      [14] Guy-Jacques Borderieux est en 2025 directeur du conservatoire de Châtenay-Malabry.


Société d'Histoire du Vésinet, 2025 • www.histoire-vesinet.org