En ce début du mois de juillet 1935,
Le Vésinet fit les gros titres de la presse nationale. Le Petit
Parisien et le Journal évoquèrent à la une l'explosion mystérieuse
qui avait soufflé une villa, le Castel Corrézien, au 13, allée
du Lévrier, dans la matinée du 3. Les photographies montraient l'amas
de décombres où s'affairaient les sauveteurs. Les pompiers du Vésinet
aidés de ceux de Saint-Germain-en-Laye, recherchaient d'éventuelles
victimes, dont Madame Sol, la propriétaire du pavillon, et procédaient
aux premiers travaux de déblaiement. Mais devant leur importance – la
villa était un vaste bâtiment de trois étages – le parquet de Versailles,
chargé de l'enquête, fit appel à l'armée. Un détachement du premier
régiment de dragon de Saint-Germain participa aux recherches le 3 juillet.
Il fut remplacé à la fin de la journée par un peloton du troisième
génie de Versailles qui poursuivit le déblaiement de la propriété pendant
deux jours encore.
L'attitude et les dernières paroles de la victime, qui n'avait pas survécu à ses
blessures, suscitèrent l'intérêt des deux journaux. Le Journal rapporta
ses paroles en première page "Assassins, assassins!... ils m'ont
tuée... ", ainsi que ses étranges confidences faites à la police.
Le Petit Parisien consacra
un long développement à cette affaire. Mme Sol avait fait l'acquisition
du Castel Corrézien en octobre 1934 après un long procès avec
l'ancien propriétaire, M. Rosen, son débiteur.
Elle avait rencontré le commissaire de police du Vésinet en février 1935
et lui avait fait part des menaces qu'aurait fait peser sur elle M. Rosen.
Celui-ci, qui avait vu ses biens saisis et vendus, avait tenté de l'entraîner
dans des affaires douteuses. Toute une série de procès s'en était suivie.
Le jour même du drame, la victime devait rencontrer une nouvelle fois
le commissaire, après avoir pris rendez-vous avec ses services la veille.
Accident ou attentat? Cette affaire intriguait. Le Petit Parisien précisait
que le compteur à gaz était hermétiquement fermé. La presse penchait
pour la thèse de l'attentat la justice enquêtait.
Qu'en était-il
vraiment? En fait, les éléments de réponse étaient déjà contenus
dans l'article du Petit Parisien. Il révélait que Mme
Sol était complètement ruinée à la suite de multiples procès
qui l'avaient opposée à M. Rosen.
D'autre part, les sauveteurs avaient retrouvé rapidement le corps
de la victime qui, selon les constatations du capitaine de gendarmerie,
avait été surprise sur le perron de sa villa. Elle avait laissé son
sac à main et son manteau devant la maison. II estimait, enfin,
que l'explosion avait été provoquée par une charge de cheddite.
L'instruction devait conclure à une explosion provoquée par la
victime. On murmura qu'il aurait pu s'agir d'une tentative d'escroquerie à l'assurance.
Mais le piège aurait trop bien fonctionné et Mme Sol en aurait été sa
propre victime. L'explosion mystérieuse garderait une part de son
secret.