D'après L'Industriel de Saint-Germain, 2 septembre 1865.

Au Vésinet : la première Saint-Fiacre, patron des jardiniers

Les horticulteurs, fort nombreux au Vésinet, se sont tous consacrés à l'embellissement du parc. En cette journée mémorable du 29 août 1865, jour de la St-Fiacre, maîtres et garçons se réunissent en un cortège dirigé par Emile Cappe [il fera partie, dix ans plus tard, du premier conseil municipal], secrétaire général de la Société d'Horticulture de St-Germain-en-Laye, également représentée. On a décoré l'église de "guirlandes composées de feuilles de chênes mêlées à des branches de bruyère et retombant des voutes de la nef en deux immenses baldaquins de verdure."

A 10 h 30, l'église est pleine de monde. Le cortège se forme 100 mètres plus bas, chez Cappe, au début de la rue de l'Eglise, à proximité de la gare du Vésinet. Il se met en marche sur le rythme de la musique qui le précède.


...Le cortège se forme 100 mètres plus bas, chez Cappe, au début de la rue de l'Eglise ...

"Dix à douze robustes jardiniers portaient sur leurs épaules la magnifique châsse figurant un monument à colonnes, surmonté d'un dôme et entièrement revêtu d'une couche de fleurs, formant les dessins aux nuances chatoyantes et variées [...] Le sommet du dôme était ombragé par une gerbe de fleurs d'où s'élançait le panache naturel et ondoyant d'une branche de glycenum argenteum [?]. Entre les colonnes, se voyait une charmante statuette coloriée de Saint-Fiacre, en costume religieux, et appuyée sur sa bêche traditionnelle. Un grand nombre de jardinier avec leur femmes et leurs filles, à la tête desquels marchait Cappe, leur grand organisateur et président, suivait le brancard, ils étaient tous porteurs à la boutonnière, d'un bleuet, signe distinctif des membres de l'association.
Le cortège arrive à l'église où l'on bénit la bannière de la statuette, à l'eau lustrale. Elle est d'étoffe de soie rouge, sur sa première face, et au-dessus de l'image en relief du saint, on lit en exergue "Je préfère ma cellule et mon jardin aux royaumes de l'univers...", paroles de Saint-Fiacre aux envoyés qui venaient lui proposer la couronne, à la mort de son père, roi d'Ecosse. Au-dessous, un écusson peint comme la figure, au pied du Saint, représentant l'intérieur de l'église du Vésinet avec quelques jardins et cette vocable: "A Saint-Fiacre, les jardiniers du Vésinet".
A l'autre face, et également peinte sur fond vert, et avec broderies relevées en brosse, l'image de Saint-Louis, surmontée de cette phrase: "Soyez, Seigneur le sanctificateur et le gardien de son temple", dernieres paroles de Saint-Louis pendant son agonie et on lit au-dessous: "Saint-Louis, roi de France, patron du diocèse de Versailles".
Deux des jardiniers circulent dans les rangs pressés, portant les corbeilles remplies de jolis bouquets aux couleurs éclatantes, présentés à chaque dame ou enfant, ceux destinés aux jeunes personnes et aux petites filles de la confrérie de la Vierge étant uniformement blancs.
Deux quêtes, sont faites: l'une pour le paiement de la riche bannière, l'autre destinée à l'entretien de l'église. La première est faite sur les instances, et d'après le choix des jardiniers, par Madame Pallu, conduite par l'intendant militaire Evrard de Saint-Jean, Président de la société d'Horticulture de St-Germain-en-Laye. La deuxième est faite par un enfant, la fille de Monsieur Cappe
[...]

 

La messe se termine sur les chants de O Salutaris, de Ave maria et du Pater noster, accompagnés par l'orgue. A midi, chacun regagne sa villa ou sa maisonnette, tandis que les jardiniers vont parachever les préparatifs du bal du soir.
La réunion commence dans la soirée sous la tente montée dans les jardins anglais du "Café Turc". D'immenses guirlandes de feuillages décorent un pan de mur. Les bosquets sont convertis en buffets de rafraîchissements et éclairés par les lanternes vénitiennes. La plupart des propriétaires et leur famille ont répondu à l'invitation des jardiniers. Animant la grande fête, l'orchestre laisse échapper une harmonie composée de petite flûte et de tambourin, relance les quadrilles et les danses de caractères, jusqu'à minuit, où la tombola commence.

Les habitants de St-Germain regagnent progressivement la station, où les derniers trains passent...


Société d'Histoire du Vésinet, 2007 - www.histoire-vesinet.org