Journal des débats politiques et littéraires, 24 juin 1932 Un exemple d'Urbanisme : Le Vésinet Depuis que l'après-guerre, en attirant autour de Paris un afflux de population sans précédent, a jeté le désordre dans sa banlieue et même dans ses environs, l'urbanisme est devenu cette chose à la mode que l'on croit avoir découverte, alors que, sous d'autres noms, elle existait déjà. A vrai dire, ce qui est nouveau, c'est l'ampleur de la tâche qui se présente. Aménager la région parisienne serait déjà une œuvre considérable, -si l'on pouvait faire table rase de tout ce qui s'est fait au rebours de ce que l'on pouvait souhaiter du triple point de vue de l'esthétique de l'hygiène et du bon sens. Il n'en sera que plus précieux pour nos urbanistes de rencontrer, au milieu de ce vaste chaos, un ensemble homogène qu'il ne reste dès maintenant qu'à protéger et à maintenir. Cette teinte verte sur la carte, dans la dernière boucle que fait la Seine avant de défiler au long de la terrasse de Saint-Germain, c'est le parc du Vésinet, ancienne chasse royale convertie, vers 1856, par un organisateur de génie, en un lieu de villégiature idéale, ou mieux encore, de résidence permanente, à usage de ceux que le voisinage de la grande ville retient pour leurs affaires ou leurs plaisirs et qui pourtant, désirent comme cadre habituel de leur vie, des arbres, des coulées vertes, des lacs et avec eux, le calme et la gaîté qui s'en dégagent. Et voici pourtant avec quelques autres dangers, ce qui menace cette chose exceptionnelle, unique, peut-on dire, puisqu'elle ne doit d'avoir été conservée qu'à la sage prévoyance de son créateur et au cahier des charges dont il l'a dotée. Il n'avait pas tout prévu cependant, et notamment que des morcellements trop nombreux, établis sans un minimum de surface totale et surtout de façade, risquaient de provoquer des constructions mal détachées entre elles et insuffisamment encadrées de verdure. Il n'avait pas pensé non plus que des entrepreneurs osés et d'ailleurs d'une imprévoyance certaine, s'essaieraient à bâtir des immeubles de rapport, détruisant tout un paysage, et iraient ainsi à l'encontre des intérêts les plus évidents des propriétaires et des commerçants du Vésinet. N'est-ce pas, en effet, en conservant au Vésinet son caractère si spécial, qui en fait une station élégante aux portes de Paris, que les propriétaires peuvent envisager une progression constante de la valeur de leurs terrains? Et n'est-ce pas aussi par ce moyen que les commerçants verront se développer une clientèle d'autant plus rémunératrice qu'elle restera choisie. La conservation du Vésinet n'intéresse pas seulement ses habitants. Elle fait doublement partie du patrimoine national. Le Vésinet s'étale au premier plan de ce panorama unique dont on jouit de la terrasse de Saint-Germain, et ce n'est pas au moment où l'on songe à relier, par une avenue grandiose la grande ville à ce magnifique massif boisé, que l'on peut laisser compromettre une des parties de ce panorama. La municipalité du Vésinet et un Syndicat d'initiative s'y emploient activement et utilement. Ils doivent, pour cette œuvre, rencontrer partout les bonnes volontés nécessaires. Gilbert de Castellan
Illustrations: Clichés Syndicat d'Initiative, 1925.
Société d'Histoire du Vésinet, 2011- www.histoire-vesinet.org |