D'après Adrien Bost pour Le Quotidien, 3 janvier 1936 [1]
Une Oasis de verdure : Le Vésinet, une ville dans un parc
La coquette cité du Vésinet, située à 13 kilomètres de la Porte Maillot, sur la route très fréquentée de Paris à Mantes, est un véritable parc de 500 hectares.
Sa population est en progression constante. Elle était de 9.500 en 1926, 11.000 en 1931 ; actuellement elle atteint 13.0000 habitants. Mais cette progression n'a pas apporté, ainsi que nous le verrons par ailleurs, les difficultés que l'on rencontre généralement dans les villes de la banlieue parisienne à développement rapide.
Le Vésinet occupe l'emplacement d'une ancienne foret, dite d'abord d'Echauffour, puis de Cornillon et, enfin, du Vésinet qui faisait partie de la grande forêt d'Yvelines.
C'est, dit-on, au lieu-dit le « Chêne de Roland » que Ganelon décida de trahir Roland et c'est là, toujours selon la légende, que Charlemagne fit périr les traîtres.
Le Vésinet devint ensuite un territoire de chasse très apprécié. Louis XIV venait souvent « à la volerie » dans la plaine du Vésinet transformée par la suite en garenne et en faisanderie.
A la Révolution française, le Vésinet devint propriété de l'Etat. Elle le resta jusqu'en 1856, époque où elle fut cédée à une société qui la vendit par lots. Mais ce lotissement, n'avait rien de commun avec ceux d'aujourd'hui. En 1858, après l'établissement d'un cahier des charges rigoureux, les premières ventes de terrain eurent lieu. La compagnie de chemins de fer, à l'époque la compagnie de l'Ouest, délivra des parcours gratuits pour aider au développement du Vésinet.
Les plans du lotissement imposaient de réserver dans le parc de nombreux espaces libres et de vastes pelouses. Une rivière artificielle, longue de 4 kilomètres, reliait cinq petits lacs. Un de ceux-ci entoure l'île « des Ibis », très belle propriété communale où sont installés un restaurant, des tennis et des jeux divers. En été, le lac est la providence des amateurs de canotage. En hiver, lorsque le temps le permet, on y patine.
Un des plus beaux sites du Vésinet : Le lac des Ibis [2]
Nos prédécesseurs nous ont laissé là des leçons de bon goût et d'urbanisme : 90 kilomètres de belles avenues et de promenades, aérées et verdoyantes.
Le Vésinet devint une commune, en 1867, à la suite d'une pétition des propriétaires et après des formalités administratives fort longues. [3]
Le premier maire du Vésinet fut M. Alphonse Pallu. Il prit une part active à la création de la commune dont il est considéré comme le fondateur.
M. Emile Thiébaut, le maire du Vésinet (1935-1941).
Le maire est M. Emile Thiébaut. Il n'occupe cette fonction que depuis le mois de juillet dernier, ayant été élu conseiller municipal en 1934 [4]. M. Thiébaut est aidé dans sa tâche par d'excellents collaborateurs : les quatre adjoints MM. Clavery, Bertin, Chambon et Jaconnet, qui se partagent la direction des différents services municipaux, et le secrétaire général de la mairie, M. Devieilletoile.
— Ainsi que vous avez pu vous en rendre compte, nous dit le maire, nous tenons à garder l'allure originale de notre ville. C'est une tradition que se sont légué les municipalités successives.
Les services publics
La viabilité est complète ; l'eau, le gaz, l'électricité sont distribués dans toute la ville. L'éclairage public actuel devra cependant être modernisé. La municipalité envisage de le transformer en éclairage électrique intensif. Cela est subordonné aux possibilités financières. La municipalité a d'ailleurs un collaborateur actif : le Syndicat d'Initiative qui met en valeur la ville, en invitant, par des panneaux placés aux carrefours, les touristes à visiter cette charmante localité.
Afin que le caractère de celle-ci ne soit pas modifié, tout le commerce local se trouve centralisé en un seul endroit appelé le « village ». La rigueur du cahier des charges empêche toute dérogation sur ce point.
— On dit, déclare M. Emile Thiébaut, que le Vésinet est une oasis de verdure. Nous continuons à embellir la ville par des plantations d'arbres et de fleurs, des pelouses, etc.
Enseignement public
Huit cents enfants fréquentent les écoles du « centre » et du « rond-point ». Les locaux deviennent d'ailleurs insuffisants et sont trop éloignés d'un nouveau quartier qui s'est beaucoup développé depuis 1919. La municipalité envisage la création d'une école mixte : garçons, filles et maternelle. Ce projet est actuellement à l'étude. Dans les écoles, des cours spéciaux de chant, gymnastique, etc. sont donnés et des ateliers de « bois » et de « fer » permettent aux élèves d'acquérir les premières notions du travail manuel.
Une colonie de vacances, dirigée par la caisse des écoles, permet chaque année d'envoyer à la campagne une cinquantaine d'enfants.
L'inspection médicale existe et une crèche municipale accueille les enfants dont les parents sont obligés d'aller à leur travail.
Œuvres sociales et chômage
Le maire du Vésinet nous apprend que le nombre des malheureux est assez important. Il est en augmentation continuelle.
— Nous avons, dit M. Emile Thiébaut, paré à ces difficultés en effectuant le maximum pour soulager les misères existantes. Il y a actuellement de 60 à 80 chômeurs appartenant à toutes les professions, surtout à celle des employés et par ces temps de crise, leur placement et leur emploi, même pour des travaux communaux, sont très difficiles.
Projets
Nous abordons ensuite, dans cette conversation avec le maire du Vésinet, les réalisations futures. Tout d'abord, l'agrandissement et l'aménagement de l'Hôtel de Ville doivent être envisagés. Les différents services y sont trop à l'étroit et la municipalité se préoccupe activement de remédier à cet état de choses. Déjà des modifications intérieures ont permis de recevoir les administrés d'une façon plus confortable et, petit à petit, des transformations plus importantes seront poursuivies. Il en est de même pour la salle des Fêtes qui, malgré ses 400 places, est trop petite. Toutes les sociétés locales donnent des fêtes, concerts, bals, etc. On y organise même des expositions d'horticulture. La salle des Fêtes doit donc être agrandie et transformée, mais la situation actuelle rend l'exécution de ce projet bien difficile.
La situation financière elle-même de la ville est bonne. Deux marchés très importants ont lieu, l'un au Village, les mardis et samedis : l'autre, au Rond-point de la République, le dimanche. Les marchés sont exploités en régie directe ; leur rapport annuel est de 200.000 francs, ce qui constitue une ressource appréciable pour les finances communales.
La municipalité aide et subventionne les nombreuses sociétés locales. L'une des plus intéressantes est la Société d'horticulture à laquelle M. Emile Thiébaut a donné une vive impulsion.
Comme nous prenons congé, M. Emile Thiébaut nous dit : « Je ne m'étais jamais occupé d'administration municipale. J'y suis venu par la force des choses, appelé par la confiance de mes collègues. J'entends accomplir ma tâche avec conscience et avec le souci constant de défendre les intérêts de mes administrés. »
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Notes et sources:
[1] Article paru dans une chronique du journal intitulée "L'effort communal"
[2] Les illustrations d'origine étant de mauvaise qualité, nous les avons remplacées par des vues similaires de la collection de la SHV.
[3] Cette information est erronée. Si la pétition initiale date bien de 1867, l'aboutissement du processus par un vote du parlement érigeant Le Vésinet en commune distincte ne fut atteint qu'en 1875.
[4] Entré au Conseil municipal après la mort d'Henri Cloppet, il fut réélu à l'élection municipale de mai 1935. Il fut élu maire après la démission pour raison de santé d'Emile Aubrun (juillet 1935).
Société d'Histoire du Vésinet,
2020 • www.histoire-vesinet.org