Jean-Paul Debeaupuis, président du Syndicat d'Initiative et Défense du Site du Vésinet, mars 2021.

Le Site Patrimonial Remarquable

    et les formes antérieures de la protection ou de la valorisation du patrimoine au XXIe siècle

 

La Zone de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager (ZPPAUP) était un dispositif instauré par la loi de décentralisation du 7 janvier 1983, dont le champ fut étendu par la loi « paysages » du 8 janvier 1993, et qui constitua à partir du 24 février 2004 l'article L6423 du Code du patrimoine. Elle avait pour objet d'assurer « la protection du patrimoine paysager et urbain et mettre en valeur des quartiers et sites à protéger pour des motifs d'ordre esthétique ou historique » en exprimant l'ambition d'améliorer la notion de champ de visibilité (périmètre de 500 m aux abords d'un monument historique) en lui substituant un « périmètre intelligent ». [1] Malgré un sigle barbare, ce dispositif rencontra un certain succès.

La constitution d'une ZPPAUP était une procédure qui tendait à donner aux communes un rôle actif dans la gestion et la mise en valeur de leur patrimoine. Elle leur permettait en effet de mener, conjointement avec l'État, une démarche de protection et d'évolution harmonieuse de certains quartiers. La décision d'engager l'étude d'une ZPPAUP appartenait au maire et à son conseil municipal en partenariat avec l'État. Le document de ZPPAUP, en tant que servitude d'utilité publique, restait annexé au plan d'urbanisme jusqu'à sa révision en plan de valorisation de l'architecture et du patrimoine (PVAP). Le plan d'urbanisme devait généralement être modifié en conséquence, et ses objectifs enrichis d'une dimension patrimoniale et qualitative [2]. C'était le conseil municipal qui, normalement, décidait la mise à l'étude de la ZPPAUP avec l'assistance de l'Architecte des bâtiments de France (ABF) et de l'ex Service départemental de l'architecture et du patrimoine. [3]

Au Vésinet, régit par un Plan d'Occupation des Sols (POS) déjà ancien (1992) et fragilisé par les évolutions légales et réglementaires, la décision d'élaborer une ZPPAUP, qui aurait entraîné ipso facto l'obligation d'élaborer un Plan Local d'Urbanisme (PLU) fut différée durant plusieurs années pour être finalement prise en 2006. Un bureau d'étude, l'atelier d'architecture et d'urbanisme Blanc-Duché, fut désigné. Constitué d'architectes, d'architectes du patrimoine, d'historiens s'associant depuis de nombreuses années avec un architecte paysagiste (Atelier de paysage de Jean-Marie Curvale) et des socio-économistes, ce bureau d'étude se livra à un minutieux inventaire, les responsables (Daniel Duché et Elisabeth Blanc) s'avouant impressionnés par la richesse architecturale et paysagère de notre ville-parc.
En préambule de l'étude préalable (janvier 2006) on pouvait lire 
[4] :

    La protection du patrimoine et la volonté de promouvoir la qualité architecturale ont toujours été les lignes directrices qui ont guidé la gestion de la commune. La spécificité du Vésinet, ville-parc, nécessite de renforcer les enjeux patrimoniaux de la commune tout en préconisant des conseils aux particuliers tant en matière de couleurs que d'architecture. A partir de l'inventaire des propriétés remarquables établi en 1991, il y a lieu de davantage marquer la grande créativité et l'originalité de l'architecture éclectique qui caractérisent la commune, l'importance de la composition urbaine voulue par le comte de Choulot et A Pallu, l'importance des arbres, des jardins et des clôtures qui caractérisent le paysage du Vésinet. La ZPPAUP est un moyen de sensibiliser les vésigondins à l'importance du bâti et du végétal, à la nécessité de les respecter.

En mai 2008, au vu des résultats très encourageants de cette étude préalable, la Ville était prête à se lancer dans l'élaboration des différents éléments d'un document négocié entre la commune et l'Etat, représenté par l'architecte des Bâtiments de France [mais aussi la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) et la Direction régionale de l’Environnement] comprenant :

    • un rapport de présentation qui expose les motifs et les objectifs de la création de la ZPPAUP ; les particularités historiques, géographiques, urbaines, architecturales et paysagères du territoire concerné,

    • un corps de règles constitué de prescriptions et de recommandations, qui orientent les interventions au regard du contexte général ou particulier des lieux,

    • un document graphique portant la délimitation de la zone, et des éventuels sous ensembles présentant des particularités.

Une fois approuvée, après enquête publique, la ZPPAUP s'imposerait aux particuliers comme à la collectivité. La gestion et la transformation de l'espace, bâti ou paysager, se feraient en référence à ce document. Ainsi, tous travaux de construction, de démolitions, de déboisement et de modification de l'aspect des immeubles seraient soumis à autorisation accordée par le Maire après avis conforme de l'architecte des bâtiments de France, dans le respect du règlement et de l'esprit de la ZPPAUP. On note ici l'importance de ce document concerté, puisqu'il constitue un cadre connu de tous, définissant les possibilités d'interventions, et permettant d'éviter les avis parfois jugés comme arbitraires tels que dans les périmètres traditionnels de protection des Monuments historiques.

    Véritable guide d'accompagnement, la ZPPAUP est conçue pour aider les différents acteurs à entretenir harmonieusement le patrimoine de la commune, pour que chacun marche du même pas sur le chemin de l'invention permanente, que demandent les exigences d'une ville attractive, et qui doit le rester en maîtrisant ses évolutions. [5]

Malheureusement, l'élaboration de ce plan de valorisation de l'architecture et du patrimoine (PVAP) fut rapidement perturbée par la mise en chantier d'un autre projet d'urbanisme, imposé par la décision de l'Etat de consacrer une large portion des terrains de l'ancien Asile impérial à la construction de logements. Le changement de majorité municipale en 2008, remettant en cause beaucoup de projets plus ou moins avancés, n'arrangeait rien.

Au début de 2010, la mise en suspens du projet de PVAP pour permettre de travailler à l'élaboration d'une Zone d'Aménagement Concerté (ZAC) dans ce qui allait devenir le Parc Princesse scella la fin de la putative ZPPAUP du Vésinet car, le 12 juillet 2010, les ZPPAUP furent remplacées par les Aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AVAP) qui comportaient de nombreuses innovations, en particulier dans le domaine environnemental. Si les ZPPAUP mises en place avant le 14 juillet 2010 pouvaient continuer de produire leurs effets de droit jusqu'au 14 juillet 2016, le projet du Vésinet, insuffisamment avancé, devrait être repris entièrement.

Les études ne reprirent qu'en 2013, pour préparer cette fois une Aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AVAP) mais elles ne furent lancées qu'après la mise en place du Plan Local d'Urbanisme (PLU) [6] élaboré « dans la douleur » entraînant un changement de majorité municipale (2012-2013) et après une élection anticipée (14 et 21 avril 2013) la victoire d'une équipe (2013-2014). Finalement arrêté en Conseil municipal le 13 août 2013, le PLU sera approuvé le 18 février 2014. On pourra consulter à cet égard le récit de cet épisode de contestation sur le site du Syndicat d'Initiative.
Mais les évolutions législatives se poursuivant de leur côté, la loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (dite Loi CAP) du 7 juillet 2016 substituait aux ZPPAUP et aux AVAP les Sites patrimoniaux remarquables (SPR), qui remplaçaient également les secteurs sauvegardés. [7]

L'arrêté faisant du Vésinet un SITE PATRIMONIAL REMARQUABLE fut pris le 15 décembre 2016 et après les étapes légales de concertation et d'enquête publique, après l'avis favorable du préfet reçu le 19 janvier 2018 fut finalement approuvé le 25 janvier 2018.

Documents cartographiques du Plan Local d'Urbanisme (PLU) et du Site Patrimonial Remarquable (SPR)

 

Les documents annexes richement documentés du plan de valorisation de l'architecture et du patrimoine

qui complètent le règlement du Site Patrimonial Remarquable.

Mais l'histoire ne s'arrête pas là !
La charrue ayant été mise avant les b
œufs (le PLU achevé avant le PVAP), encore faudra-t-il rendre le PLU conforme en tous points (le diable est dans les détails) avec le règlement du SPR qui s'impose à lui comme servitude d'intérêt public. Il y a donc encore de multiples causes de débats en perspective, voire de litiges et de recours. Néanmoins, le statut de site patrimonial remarquable (qui affecte près de 70% de son territoire) ajouté au vaste Site classé élève au Vésinet un nouveau rempart face aux remises en cause de son statut particulier.

    ...Pour en savoir plus : télécharger le dossier du SPR sur le site de la ville : [SPR]

    Attention, le dossier complet [.ZIP] qui contient le Rapport de présentation, le Diagnostic territorial et le Règlement (auxquels s'ajoutent d'importantes annexes : Maisons exceptionnelles et de grand intérêt architectural ; Jardins remarquables ; Arbres remarquables ; Portails et clôtures remarquables) ainsi qu'un document cartographique signé, compte plus de 130 Mb.

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    Notes et sources:

    [1] Les ZPPAUP (et les adaptations qui leur firent suite) étendaient le régime de protection au-delà des critères traditionnels du site classé ou inscrit en incluant « des paysages plus ordinaires et des espaces urbains, que le zonage permet de reconnaître et de valoriser dans des politiques intégrées de développement local ».

    [2] Cette dimension qualitative, présente dans les règlements d'urbanisme du Vésinet depuis 1937 et devant être exclue d'un éventuel PLU était une des raisons de la défiance que la municipalité du Vésinet témoignait à cette nouvelle forme de réglementation.

    [3] Les services départementaux de l'Architecture et du Patrimoine (SDAP), services déconcentrés de l'État relevant du ministère de la Culture, à l'échelon départemental, ont été remplacés par les services territoriaux de l'Architecture et du Patrimoine (STAP), depuis 2010.

    [4] Le Cahier des clauses techniques particulières avait pour objet de définir le contenu et les conditions de conduite de l'étude préalable à la création d'une ZPPAUP sur le territoire de la commune du VESINET. Celle-ci avait été décidée au Conseil municipal du 23 janvier 2006.

    [5] Qu'est-ce qu'une ZPPAUP ? Le Vésinet, la revue, n°50, juin 2008.

    [6] Par délibération du 28 mai 2008, le Conseil municipal a prescrit tout à la fois l'élaboration d'un Plan Local d'Urbanisme sur la totalité du territoire, mais aussi prescrit la mise en révision du Plan d'occupation des sols (POS) l'ancienneté de ce document d'urbanisme ; l'évolution du contexte juridique ; la mise en place d'une Zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP)... nécessitent la mise en cohérence de ces dispositions avec le document d'urbanisme."

    [7] Un secteur sauvegardé était une zone urbaine soumise à des règles particulières en raison de son « caractère historique, esthétique ou de nature à justifier la conservation, la restauration et la mise en valeur de tout ou partie d'un ensemble d'immeubles bâtis ou non » (Code de l'urbanisme, art. L. 313-1, ancienne rédaction). Ces secteurs comprenaient en particulier les centres historiques de nombreuses villes.

     


  

Société d'Histoire du Vésinet, 2021 • www.histoire-vesinet.org