Extraits commentés de Souvenirs pour demain de J-L Barrault (1972)

Le Vésinet dans les mémoires de Jean-Louis Barrault

  page 5 :

[...] Ma mère m'a mis au monde le 8 septembre 1910 à 10 heures du matin, précise l'acte de la mairie. Cela se passait au 11, rue de l'Eglise, au Vésinet, banlieue résidentielle à dix-sept kilomètres de Notre-Dame de Paris.
Mon père, Jules Barrault, y était jeune pharmacien, son officine était modeste. Il arrondissait ses moyens d'existence en travaillant à l'asile d'aliénés du voisinage [1].

En réalité, il aimait la politique [2]. Socialiste, il fut l'un des premiers léninistes, par idéalisme. Au fond de lui-même, il se sentait poète, aussi s'évanouissait-il à la vue du sang quand, dans sa pharmacie, on lui ramenait un blessé. Il avait trente-quatre ans, il n'avait plus que huit ans à vivre - mais ça, il ne le savait pas [3]...

    [1] Il s'agit là d'une confusion fréquente. L'Asile en question n'est  pas un "Asile d'aliénés" mais l'Asile national du Vésinet.  Jules Barrault devait y trouver un certain prestige puisqu'il  faisait figurer la mention "Pharmacien de l'Asile national du Vésinet" sur les étiquettes de ses flacons.  D'autre part, on trouve dans la presse paramédicale de l'époque une "réclame" qui nous apprend qu'une "pommade Barrault, préparée par J. Barrault, pharmacien en chef de l'Asile National du Vésinet, est aussi toute indiquée pour la guérison prompte et radicale des eczémas, sans aucun danger de voir le germe de cette maladie se reporter sur un autre organe" (Almanach Normand-Percheron, 1907).

    [2] Jules Barrault fut conseiller municipal et premier adjoint aux côtés de Gaston Rouvier. Elu conseiller municipal le 10 mai 1908, sur la liste radicale de Gaston Rouvier, il est élu premier adjoint le 26 juillet 1909. La liste sera réélue en 1912 et Jules Barrault sera reconduit dans sa fonction mais quittera le Vésinet peu après.

    [3] Jules Barrault, est mobilisé en Août 1914. Pharmacien auxiliaire à la section d'infirmiers du 3e Corps, il est mort de la grippe, au Centre de réforme des Tourelles, à Paris, le 16 octobre 1918. A ses obsèques au cimetière du Père Lachaise, Gaston Rouvier prononça son éloge funèbre.

 


... page 8 :

Il y avait au Vésinet une Société de théâtre amateur, "l'Essor". Mes jeunes gens de père et mère en faisaient partie et jouaient la comédie. Mon père excellait, parait-il, dans le Luthier de Crémone de François Coppée. Ma mère avait une jolie voix, une ravissante frimousse, de la gaieté, le petit nez retroussé de Paris, un regard de chatte. De plus, cette chatte avait "du chien". C'est-à-dire, en bon français, du charme. La vie devait être bien douce et insouciante au Vésinet !... La carrière dramatique du couple Barrault devait, hélas! s'arrêter court, car pour mes deux ans, mes parents m'offrirent Paris. [1]

sur les traces de son père...
Jean-Louis Barrault
au Théatre du Vésinet,
9 mai 1978

 

    [1] Jean-Louis Barrault - Souvenirs pour demain (Editions du Seuil, Paris, 1972 - 1 vol. in-8 broché , 382 pages) est disponible à la bibliothèque municipale.


© Société d'Histoire du Vésinet, 2003-2011 – http://www.histoire-vesinet.org