Bulletin Municipal n°14, p51 Décembre 1969

Quelques demeures célèbres du Vésinet


MAISON DE LA FAMILLE BAUER 6, route des Bouleaux
Le critique dramatique Henri Baüer, fils naturel d'Alexandre Dumas, habitait cette maison l'été à la fin du siècle dernier et il lui arriva de s'y battre en duel dans son jardin. Son fils Gérard, le futur chroniqueur, y naquit en 1888 et en partit à l'âge de deux ans.


"LA BONNE LUCIE" 18, route des Bouleaux
Cette maison appartenait, vers les années 1920-1930, au fondeur Rudierqui habitait la grande propriété située tout près de là, avenue Georges-Clemenceau, et prêtait cette demeure-ci à des amis, dont le sculpteur Bourdelle qui va y faire plusieurs séjours. C'est lors du dernier d'entre eux, en 1929, que l'artiste qui s'apprêtait à regagner Paris mourut subitement ici le 1er octobre.
Plus tard, la maison vendue par Rudier fut achetée en 1937 par Mme
Lucie Pauwels, au nom de Maurice Utrillo qu'elle venait d'épouser. Celui-ci y passa toute la dernière période de sa vie dramatique. Le grand peintre vécut ici jusqu'aux dernières semaines qui précédèrent sa mort survenue à Dax en 1955.
Dans le parc a été placée, un moment, une statue provenant, dit-on, de l'ancien Hôtel de Ville de Paris, "
La Peinture", qui orne maintenant la tombe d'Utrillo au cimetière St-Vincent à Montmartre.

La Bonne Lucie (la maison d'Utrillo) vue par le peintre Robert Rodrigue.

 


PALAIS ROSE Allée des Fêtes et 14, rue Diderot
C'est un bâtiment bas, style "Grand Trianon", accompagné, par derrière, d'une autre construction : l'Ermitage.
Construit à la fin du siècle dernier (1899) pour l'armateur
Schweitzer, qui ne l'habita pas, le Palais Rose fut acquis en 1906 par un richissime Hindou, (Ratanji Tata) qui d'après la légende, l'acheta contre deux perles et une émeraude... La propriété fut acquise en 1908 par Robert de Montesquiou qui en parle dans ses Mémoires, "Les pas effacés". Dans le parc, il avait placé l'ancienne cuve de marbre de l'appartement des bains de Louis XIV à Versailles, installée ici sous un faux temple de l'Amour (en 1934, à la vente du Domaine, elle sera rachetée par Versailles). Il y donna des fêtes splendides. A propos de l'une d'entre elles, un de ses ennemis lui joua le tour de la décommander quelques jours avant dans une rubrique mondaine tenue par une princesse étrangère qui, bien que veuve d'un muletier pyrénéen, continuait à porter son titre. Montesquiou la rencontrant quelques jours plus tard lui demanda avec hauteur de quel droit elle avait osé décommander sa fête : "Mais c'est vous-même, déclara la Dame, qui m'avez écrit ce petit mot où vous me disiez : Princesse... "
Le Poète coupa : "
Et vous avez cru le reste ?... ".
Vinrent ici
Sarah Bernard, D'Annunzio , Proust d'autres encore.
C'est à l'Ermitage que séjourna, en mai 1940, le
Colonel de Gaulle, le poste de Commandement de la 4e Division Cuirassée ayant été fixé au Vésinet, 32 Boulevard Carnot.

Le Palais rose peint par ¤¤¤¤¤.
Collection particulière, tous droits réservés (cliché shv, 2012)

 


PROPRIETE RUDIER Avenue Georges-Clemenceau et route de la Villa-Hériot
Dans ce grand parc boisé, Rudier avait disposé certaines des plus importantes statues, fondues par lui, entre autres des œuvres de Rodin, Bourdelle et "Le Faune" de Darde. A la mort du fondeur, la propriété fut longtemps abandonnée et les socles demeurent vides. La tombe de Rudier se trouve au cimetière du Vésinet, elle est ornée de "L'Ombre " de Rodin, bronze exécuté par le fondeur et qui ornait, autrefois, sa propriété. La famille de Rudier eut, dit-on, beaucoup de mal à obtenir à l'époque l'autorisation de placer dans le cimetière cette figure nue.


"LA MARGUERITE" 14, avenue de la Marguerite
C'est la première villa du Vésinet construite pour Pallu en 1869 et baptisée du nom de sa première fille Marie Marguerite, décédée en 1860 à l'âge de dix ans. En 1925, lors du Cinquantenaire de la Commune, une plaque y a été posée.

La Marguerite vue par le peintre Robert Rodrigue.

Cette toile a obtenu le premier prix au Salon Le Vésinet vu par ses peintres (1969)

 


LA MAISON D'ALAIN 75, avenue Emile-Thiébaut
C'est dans cette petite maison que le grand écrivain et philosophe Alain s'était retiré en 1917 au terme d'une longue carrière universitaire. Il continua à y écrire, cloué à son fauteuil depuis 1939 par un rhumatisme articulaire. Le Grand Prix National des Lettres qui venait de lui être décerné lui fut remis ici, en 1951, par le Ministre qui était l'un de ses anciens élèves. Il mourut dans cette maison quelques semaines plus tard.
Mme
Emile Chartier, sa veuve, s'est éteinte à son tour il y a quelques semaines en Bretagne. A sa mort, respectant les volontés de l'auteur des célèbres "Propos ", elle a décidé de léguer à la Ville la petite maison où ils vécurent tous deux pendant de nombreuses années. A la Ville reviendront également certains meubles et objets se trouvant dans la maison, et notamment de précieux manuscrits, quelques-uns inédits, de celui qui fut l'une des plus authentiques valeurs de la pensée moderne. C'est aussi la Ville qui sera la bénéficiaire des droits d'auteur, de façon à lui permettre d'entretenir cette maison du souvenir et de la transformer en un véritable musée, avec l'aide de l'Association des Amis d'Alain.

La Maison du philosophe Alain.

Dessin anonyme et sans date. Collection particulière. Tous droits réservés


Société d'Histoire du Vésinet, 2002 - www.histoire-vesinet.org