D'après René Sédillot, La Lyonnaise des Eaux a cent ans (1880-1980), SDE, Paris 1980 et Boire au Vésinet, Revue municipale, N° 63, juin 1983. La Compagnie des Eaux LABOR IMPROBUS OMNIA VINCIT "Toute réussite est le fruit d'un travail acharné"
Cette devise (celle d'Alphonse Pallu) figure
toujours sur la façade du bâtiment des pompes de l'usine située Allée
des Machines en bordure de Seine à Croissy. La plaque porte la date de
1860, année de l'inauguration des installations qui furent bénies par
l'Evêque de Versailles.
La distribution de l'eau était une des principales dispositions du cahier
des charges de 1863. Le prix proposé était alors inférieur de
50% aux tarifs des autres grandes Compagnies de la région. Ce principe
de tarification restera en vigueur durant 60 ans, jusqu'à la Convention signée en 1921
entre la Société des Terrains & Eaux du Vésinet, et le Syndicat des
Propriétaires du Vésinet, association (loi 1901) constituée un an plus
tôt. "La salubrité des eaux que la compagnie distribue aux trois communes du Vésinet, de Chatou et de Croissy a été contestée dans les journaux. Il était de mon devoir d'éclaircir la question. J'ai dans ce but soumis le cas à Monsieur le Préfet de Seine & Oise qui a saisi le Conseil d'Hygiène. Je m'empresse de vous faire connaître les résultats de cette investigation." Les chimistes apprécieront, les biologistes resteront sur leur faim.
microbes de l'eau d'alimentation urbaine en 1850 (Hassall) Le premier réservoir ou "Château
d'eau" avait été intégré au paysage avec beaucoup de soin. Le premier et le deuxième château d'eau (à droite) La Société Pallu & Cie, devenue Société Sauvalle & Cie à la mort d'Etienne Pallu, puis Société d'Anterroches, du nom du beau-frère d'Etienne Pallu, aussi désignée sous le nom de Société des Eaux et Terrains du Vésinet signa le 2 avril 1921, une Convention avec le Syndicat des Propriétaires du Vésinet, association constituée le 22 avril 1920, représentée par Messieurs Léon Ozouf, président du Syndicat, Alfred Chollet, trésorier. La guerre ayant profondément modifié les conditions économiques existant à l'époque du Cahier des Charges, et les compteurs étant devenus le mode le plus général de distribution, les parties convenaient d'un commun accord d'une révision des conditions du "Service des Eaux privées" et précisaient le "Service des Eaux publiques" (l'entretien et l'approvisionnement des Lacs et rivières) : "La Société déversera dans les lacs et rivières une quantité d'eau suffisante pour alimenter un courant constant d'intensité notable jusque dans la partie du système de rivières et lacs la plus éloignée des points de déversement. [...] Les lacs et rivières seront toujours tenus par la Société en parfait état de propreté et d'étanchéité, sauf en ce qui concerne le Grand Lac qui appartient à la commune du Vésinet. Les curages et nettoyages auront lieu autant de fois qu'il sera nécessaire pour obtenir ce résultat. Les fuites seront aveuglées dès qu'elles se seront produites." La convention comportait un chapitre intitulé Faculté de substitution prévoyant le désengagement de la Société d'Anterroches "au
jour où ils auront constitué une Société spéciale pour ce service" [...] pouvant se charger de faire, à perpétuité et dans les conditions
prévues, tant dans le Cahier des Charges que dans la présente convention,
le service des eaux publiques et privées". Ce fut chose faite
trois ans plus tard, avec la prise de contrôle
de ses actifs, par la Société Lyonnaise des Eaux et de l'Eclairage (SLEE). La captation des eaux (croquis, 1950) L'eau était captée par une série de forages dont les parois étaient cuvelées par un tube d'acier au fur et à mesure de l'avancement des travaux, en assurant l'étanchéité parfaite. Ces forages, reliés entre eux et à la conduite d'aspiration de l'usine, permettaient de puiser l'eau sur une grande surface sans crainte d'appauvrir la nappe, ni danger de pollution par la nappe d'alluvions. L'eau était ensuite distribuée à partir du réservoir mentionné plus haut. Un nouveau réservoir, [celui qui est encore en activité] fut mis en service en 1929. En 1932, lorsque le syndicat d'Initiative et le Syndicat des propriétaires réclamèrent le classement des "espaces verts" du Vésinet, la SLEE s'opposa à ce que la mesure s'étende à ses possessions : les lacs (sauf les Ibis, achetés par la ville en 1914) et les 4 km de rivières. Mais elle n'eut pas gain de cause. Au même moment, entre 1932 et 1937, la SLEE réalisait de grands travaux qui donnèrent aux installations la configuration qui subsiste encore : deux groupes de puits, Le Pecq et Le Mexique, et trois usines de pompage, Pecq-Minor, Pecq-Major et Croissy. En 1966, G. Massoulié, directeur d'exploitation à la SLEE, expliquait pour le Bulletin municipal (n°5) le développement et les mécanismes de l'alimentation en eau du Vésinet. Des problèmes de goût se manifestaient à nouveau. Comme cela est souvent le cas avec les ressources souterraines, les eaux de la nappe renfermaient du fer et de l'ammoniaque. Ces deux composés favorisaient le développement d'algues génératrices de mauvais goûts, "pharmaceutiques" en particulier. Pour essayer de résoudre ces problèmes, furent installées une déferrisation et une stérilisation à l'eau de Javel. En 1949, un contrat de concession d'une durée de 30 ans fut signé entre la commune du Vésinet et la SLEE qui renonçait au "privilège perpétuel" qu'elle avait hérité de la Société Pallu & Cie, entre autres le droit de poser des conduites d'eau dans toutes les voies de communication de la ville. En contrepartie elle obtint le droit exclusif de distribuer l'eau potable pendant la durée du contrat. En 1974, le contrat fut renégocié et modifié puis prolongé pour une nouvelle durée de 30 ans. En ce qui concernait les lacs et rivières du Vésinet, la SLEE s'engageait :
Après la guerre, l'urbanisation de la banlieue Ouest avait connu un développement prodigieux. Du point de vue du distributeur d'eau cela eut deux conséquences :
La nappe de la Boucle fut sauvegardée. Bien plus, sa capacité journalière qui n'était que de 40 000 m³ avant la guerre a été augmentée jusqu'à 150 000 m³. Ce résultat a été obtenu par la mise en oeuvre successive d'installations de traitement spécifiques de chacun des problèmes rencontrés:
Le développement ci-dessus n'a d'autre but que de souligner ce que l'existence actuelle d'une nappe de grande capacité, de bonne qualité dans la Boucle de la Seine, doit à l'acharnement thérapeutique de tous ceux qui en ont eu la responsabilité totale ou partielle, de ses installations de captage, de ses installations de traitement et de son environnement. Mais rien n'est jamais définitivement acquis et c'est avec la même patience qu'il convient de continuer à oeuvrer pour la pérennité de la ressource. En 1983, les pays de la CEE ont adopté une norme de qualité pour l'eau potable. Ce texte tenait compte des progrès réalisés depuis trente ans tant en matière de moyens analytiques, qu'en matière d'approfondissement des connaissances sur les conséquences à long terme sur l'organisme humain de tel ou tel produit naturel ou de synthèse. La réglementation antérieure (1961) ne considérait que 25 paramètres dont deux bactériologiques. Celle de 1983 en retenait 62, dont six paramètres bactériologiques. Sa mise en œuvre impliquait une plus grande complexité des chaînes de traitement : généralisation de l'emploi du charbon actif en grains et d'une double stérilisation. En effet, l'ozone, dont nous avons dit l'intérêt plus haut, a un point faible son instabilité. De ce fait, on ne retrouve pas de désinfectant résiduel aux extrémités des réseaux, Il faut donc désormais ajouter au traitement par l'ozone un traitement par le chlore, à dose très faible il est vrai. La volonté des pouvoirs publics protéger mieux que par le passé les nappes souterraines contre toutes les possibles agressions de l'environnement contemporain, amène à relancer toute une série d'actions. L'eau du Vésinet est de bonne qualité. il a fallu, pour en disposer, résoudre un grand nombre de problèmes. Cela s'est fait au fil du temps. Les installations sont fiables, le procédé de réalimentation de la nappe a permis d'ignorer la sécheresse de 1976. L'énorme réservoir souterrain que constitue la couche de craie nous met à l'abri des pollutions de la Seine. Il reste à acquérir des parcelles supplémentaires autour des bassins et des puits de sorte qu'aucune installation industrielle nouvelle ne vienne créer un risque supplémentaire de pollution. L'eau est contrôlée à toutes les étapes de son traitement, la bactériologie est faite quotidiennement au départ des trois usines, le taux de stérilisant est mesuré en continu. Chaque année c'est plus de 11 000 paramètres de l'eau qui sont mesurés et comparés aux normes de potabilité. Jusqu'en 1970, l'eau des lacs et rivières
était issue de la Seine. Depuis, près de 300 000 m³ sont
pompés annuellement dans la nappe phréatique du Pecq-Croissy pour être
injectés dans les lacs de Croissy (7 500 m³), Supérieur
(9 900 m³) et de La Station (11 500 m³),
avant d'emprunter les canaux reliant les lacs entre eux.
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